Emballement et interrogations autour des montres connectées

Les montres connectées continuent d'agiter les esprits à Baselworld. Les entreprises horlogères observent attentivement le développement de ces produits, alors qu'une dizaine de marques ont d'ores et déjà présenté leurs propres modèles à Bâle.
 
Bâle (ats) Plusieurs marques suisses se sont récemment lancées dans la course, à l'image de Breitling, qui a présenté un projet de chronographe connecté à un smartphone. Frédérique Constant, Alpina et Mondaine ont également dévoilé des montres connectées.
 
Alors que Swatch Group, le numéro un mondial de l'horlogerie, a présenté il y a deux semaines ses projets dans ce domaine, des voix alarmistes sur la menace que représente la montre connectée pour l'horlogerie suisse continuent de se faire entendre.
 
Selon Elmar Mock, l'un des créateurs de la Swatch, les horlogers suisses ont trop de retard dans cette phase qu'il qualifie d'innovation de rupture. La montre connectée met en danger le segment de la montre classique de type moyen de gamme, a-t-il déclaré dans un entretien paru samedi dans "Le Temps".
 
Un avis que ne partage guère François Thiébaud, président de Tissot, la marque emblématique de milieu de gamme de Swatch Group. "Il y a une complémentarité, pas une opposition, le téléphone n'a pas tué la montre", a-t-il affirmé dans un entretien accordé à l'ats lors de Baselworld.
 

Savoir-faire

 
Dans ce contexte d'emballement, le président de Tissot relève un point particulièrement positif: "On n'a jamais autant parlé d'horlogerie". Tout comme le directeur général de Swatch Group Nick Hayek, François Thiébaud souligne le savoir-faire du groupe biennois dans la miniaturisation électronique et l'autonomisation des batteries.
 
Le projet de Tissot de montre connectée, via une extension de sa ligne T-Touch, reflète la stratégie de Swatch Group. Concrètement, il s'agit de produits connectés "swiss made", qui ne dépendent pas d'un téléphone et qui bénéficient d'une large autonomie.
 
François Thiébaud estime par ailleurs que la majorité des montres connectées s'inscriront hors "swiss made". Par exemple, la future montre connectée de TAG Heuer ne sera pas estampillée "swiss made", a indiqué son président Jean-Claude Biver.
 

"Swiss made" ou non

 
La marque chaux-de-fonnière, détenue par le groupe de luxe français LVMH, a dévoilé en grande pompe à Bâle son association avec les deux géants américains Google et Intel pour créer son modèle. La société n'est pas en mesure de concevoir seule sa montre connectée de luxe.
 
Les marques rencontrées à Baselworld sont toutefois loin de montrer le même enthousiasme. Certina, la marque sportive de milieu de gamme de Swatch Group, n'a aucun projet dans ce sens à court terme. "Nous vendons des valeurs horlogères à long terme, et pas des produits électroniques de grande consommation", explique son directeur Adrian Bosshard.
En cas de changement de stratégie, la marque pourra néanmoins bénéficier des ressources de développement très importantes de Swatch Group.
 
La marque genevoise Raymond Weil n'a pas non plus de projet de montre connectée. Son directeur Elie Bernheim critique des visions à très court terme et un certain opportunisme. A ses yeux, le principal problème de la montre connectée est son obsolescence. Or, un garde-temps représente "une tradition et un héritage", relève-t-il.
 

Séduire les jeunes

 
Elie Bernheim observe cependant les récentes évolutions avec attention: "Notre bureau de recherche et de développement travaille à différentes options, ce marché a un potentiel".
Selon le président de Patek Philippe Thiery Stern, le milieu de gamme peut un peu s'inquiéter. La montre connectée pourrait par contre aider des marques comme Patek en remettant au goût du jour le fait de porter des montres à son poignet chez les jeunes, estime-t-il.
 
Reste que pour lui il ne s'agit pas d'une innovation majeure. "Les gens ont tendance à surréagir", relève le président de la marque genevoise active dans le très haut de gamme. Et d'ajouter: "Nous en sommes encore qu'au début, j'aimerais voir les 3e et 4e générations de ces modèles".
 
Thierry Stern fait également remarquer les différences entre une montre et un objet connecté. "Patek, c'est une mémoire par rapport à un événement de votre vie, c'est un symbole, un statut, des choses que la montre connectée ne donne pas", résume-t-il.
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