Made in USA (V)

Human Resources

On l’oublie souvent mais le terme «Human Resources» est né aux Etats-Unis et est donc chargé de présupposés culturels. Né ici, théorisé ici, intégré ici, le «Human Resources Management» s’est rapidement étendu à toute la planète. 

Par mimétisme ou «modernisme», nous avons adopté ce nom sans trop nous poser de questions. Nous qui aimons parfois trop critiquer la culture US et les ados qui la mettent sur un pied d’estale, nous avons fait exactement pareil... Certes, «Gestion du Personnel», ça sonnait mal. Genre XIXème siècle, rond de cuir et odeur d’amidon... Alors pourquoi ne pas céder aux lumières du marketing d’outre-Atlantique, toujours en avance d’un bon mot, ou d’un joli concept.
 
Certes, les composantes fondamentales de la fonction «HR» semblent être les mêmes quel que soit l’endroit où l’on se trouve. Mais en y regardant de plus près, les différences culturelles – ou de marché – influencent pourtant la façon dont «on» pense et on «fait» les «Human Resources».
 
Il y a de nombreuses années, lors du passage de la Direction du Personnel vers la DRH, de nombreux professionnels se sont sentis valorisés. Ils allaient enfin quitter leur noir placard administratif pour se retrouver sous les projecteurs, jouant un rôle stratégique, devenant des «Human Resources Business Partners». C’était un peu de Hollywood qui entrait dans les bureaux des gestionnaires de la paye!
 
Mais une fois l’enthousiasme retombé, et le mot rentré dans le vocabulaire «corporate», il est peut-être venu le temps de s’interroger. Au-delà de la pensée de certains brillants enseignants ou consultants, il ne faut pas oublier que l’origine US des «Human Resources» est intrinsèquement liée à la façon dont nos amis américains conçoivent, perçoivent et construisent l’entreprise. On ne peut dissocier leur vision de la «HR Function» de celle de l’entreprise et de sa gouvernance.
 
Et c’est justement à ce niveau que nous avons commis une petite erreur. En acceptant de devenir «Human Resources», nous avons aussi accepté un schéma de gouvernance, d’organisation et de culture d’entreprise. En gros, nous nous sommes retrouvés dans la situation de celui qui achète un produit sympa, mais qui se retrouve avec un abonnement aux clauses mystérieuses qui l’engage pour des décennies.
 
En adoptant le terme «Human Resources», nous avons adopté une culture. Et une fois le mouvement engagé, d’autres «buzz words» sont arrivés: «business partner», «strategic partner», «coaching», etc.
 
Rien de mal à cela me direz vous? Peut-être. Mais lorsque je discute avec des collègues HR des quatre coins du monde, je suis surpris d’entendre régulièrement les mêmes complaintes: le règne du court terme, la soumission aux indicateurs financiers ou le règne du process. Force est de constater que ces références (temps, finance, process) sont des éléments constitutifs de la culture «business» que nous avons achetée en prenant ce joli nom d’«Human Resources».
 
Aujourd’hui, nous trimbalons sur nos épaules cette standardisation par le titre. Au point que lorsque l’on essaie de sortir d’«HR» pour s’appeler autrement, on n’y arrive pas. Parce qu’au-delà d’adopter un titre, nous avons adopté une posture. La fonction «HR» a un temps différent, au lieu de s’occuper de process, elle devrait jouer un jeu politique, être un acteur de pouvoir et non pas uniquement un «partner», et ne peut être uniquement «globale» mais doit penser plus «international».
 
Mais rien de tout cela n’entre dans le cadre de référence des penseurs originaux de la fonction «Human Resources». Parce que le modèle du «business» – version US – n’est tout simplement pas câblé comme ça. Alors, mes chers/chères ami(e)s HR pensez-y. Un de nos rôles les plus importants est de ne pas accepter l’évidence du business, pour y contribuer d’une façon différente, avec nos particularités et nos valeurs. Est- ce que le terme «Human Resources» vous y aide? On en doute.
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Serge Panczuk est Vice President Human Resources International chez Edwars Lifesciences.

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