Prévoyance professionnelle

La prévoyance professionnelle au cœur d’une stratégie RH

Augmentation de l’espérance de vie, baisse du taux de natalité et départ à la retraite de la génération des baby-boomers: les défis à relever pour les institutions de sécurité sociale et la Fonction RH sont complexes. Voici quelques réflexions stratégiques qui méritent d’être menées.

L’augmentation de l’espérance de vie dans les pays industrialisés augmente fortement la pression sur le financement des institutions de sécurité sociale, soit le 1er et le 2ème pilier. Tant en Suisse avec le projet de réforme prévoyance 2020 (rejeté par la population suisse en automne 2017) que dans d’autres pays d’Europe, l’augmentation de l’âge de la retraite est souvent une des mesures proposées par les gouvernements afin d’équilibrer les cotisations et le paiement des prestations.

Actuellement, l’âge de la retraite ordinaire en Suisse est de 64 ans pour les femmes et 65 ans pour les hommes. D’autres pays, notamment en Europe, ont déjà dépassé ces seuils. La tendance est donc très claire! Cette augmentation signifie que les employés resteront plus longtemps sur le marché du travail. Ce vieillissement d’une certaine population d’actifs aura des répercussions sur le mode de fonctionnement des entreprises et plus particulièrement sur la gestion des ressources humaines. Un exemple est l’adaptation des conditions de travail qui induit la réflexion sur la préservation de la santé des ainés actifs sur le marché de travail. Par conséquent, les ressources humaines devront gérer une population multigénérationnelle ayant des besoins très différents, sans parler du besoin croissant de prestations dans le domaine de la gestion de la santé en entreprise.

Augmentation des retraites anticipées

L’augmentation de l’âge de la retraite influence directement un défi que les ressources humaines devront maîtriser davantage dans le futur: la flexibilisation de l’âge de la retraite. En effet, selon l’étude Swisscanto sur les caisses de pension publiée en juin 2018*, 60% des employés partent actuellement en retraite anticipée. On observe aussi que de plus en plus de personnes échelonnent leur départ en retraite sur plusieurs années avec une variation du taux d’activité. Cette flexibilisation, encouragée par le législateur, aura comme conséquence une population croissante travaillant à temps partiel et ce, sans compter la tendance du travail à domicile (Home Office). Ces phénomènes présupposent que les ressources humaines ainsi que les responsables des départements devront gérer une complexité accrue de l’organisation du travail, à l’image du transfert des savoirs entre des personnes qui se partagent le même poste (job-sharing) ou entre les travailleurs expérimentés et les jeunes collaborateurs.

Un autre défi pour les ressources humaines est la baisse progressive du taux de conversion au sein des caisses de pension. En ne tenant pas compte des rendements des marchés financiers et de l’attribution d’intérêts sur les comptes vieillesse des collaborateurs, une diminution du taux de conversion sans augmentation des bonifications vieillesse ou du salaire assuré engendre une baisse des prestations de retraite. Cette conséquence est certes seulement ressentie à l’âge de la retraite mais change la rémunération globale que l’employé reçoit en échange de ses services. En outre, une amélioration du plan de prévoyance pour contrecarrer cette tendance peut avoir un impact immédiat sur le revenu net des collaborateurs ou, si cela est compensé par l’employeur, une augmentation des dépenses pour ce dernier. Un vrai casse-tête pour les ressources humaines!

Rien de pire que le copier-coller

Les pratiques RH à mettre en place pour contrecarrer ces défis sont très diverses et doivent être sélectionnées avec soin et être cohérentes avec la stratégie de l’entreprise mais aussi avec les autres pratiques RH déjà en place ou à venir. Il n’y a rien de pire que de copier une approche d’une autre entreprise qui ne fait aucun sens dans son propre environnement.

Les démarches des RH au niveau de la prévoyance professionnelle doivent être analysées dans le cadre de la proposition de valeur employeur (PVE). La PVE inclut tout ce que l’entreprise offre aux collaborateurs en échange des efforts fournis. Elle n’inclut pas seulement des prestations concrètes comme la rémunération, les congés ou la prévoyance professionnelle, mais aussi des éléments moins tangibles tels que les valeurs et la culture. Chaque entreprise dispose d’une PVE, même si elle est souvent inconsciente et non communiquée. Comme déjà évoqué, des changements au niveau du plan de prévoyance, affectent la rémunération globale et de ce fait la PVE. La même logique s’applique au choix de la caisse de pension et sa capacité à rémunérer les comptes de vieillesse des collaborateurs avec des intérêts.

La prévoyance: préoccupation n°1 des Suisses

Une PVE en ligne avec le positionnement stratégique souhaité permet à l’entreprise d’attirer mais aussi de fidéliser les collaborateurs. Dans ce contexte, les prestations offertes dans le cadre de la prévoyance professionnelle deviennent de plus en plus importantes. En effet, nous constatons dans nos entretiens de recrutement et dans le cadre des discussions avec nos clients que les collaborateurs se renseignent de plus en plus sur les prestations de prévoyance professionnelle. Cette tendance est confirmée par le baromètre des préoccupations*, où la prévoyance vieillesse est passée en tête des préoccupations de la population Suisse! Les RH jouent un rôle extrêmement important dans la définition des prestations de prévoyance professionnelle afin d’assurer qu’elles complètent la PVE souhaitée par l’entreprise.

Il est également possible d’apporter des modifications sans surcoût aux plans de prévoyance. Par exemple, le choix des échelles de contribution ou les plans de prévoyance dits «1e». Ces derniers permettent à chaque collaborateur au-delà d’un seuil de CHF 126 900 salaire annuel de choisir sa stratégie d’investissement pour cette part respective. Ces possibilités permettent de rendre les plans de prévoyance plus attractifs.

Les défis sont multiples mais il existe des solutions tant au niveau des pratiques RH que de la prévoyance professionnelle. Le plus important est d’avoir une vue d’ensemble des différents changements et d’analyser avec soins l’impact des pratiques que chaque entreprise souhaite mettre en place.

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Patrick Zwahlen est directeur HR Services chez Trianon SA et dispose de plus de 10 ans d’expérience dans le domaine «compensation & benefits». Trianon SA est un prestataire spécialisé dans la gestion administrative RH, le payroll, la prévoyance professionnelle, la gestion des absences et sinistres et des portefeuilles d’assurances de personnes. Lien: www.trianon.ch

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