Débat

Les hobbys ont-ils encore leur place sur un CV?

Nombreux sont les candidats qui mentionnent encore leurs hobbys dans leur CV. Est-ce vraiment utile? Voire même contre-productif dans certains cas? Deux responsables RH en débattent.

Pour: Etienne Besson

Permettez-moi tout d’abord de clarifier un point: je n’ai rien contre les hobbys sur un CV. J’estime simplement qu’ils n’apportent pas de vraie plus-value. Il s’agit très souvent d’une liste d’activités assez ennuyeuses. Cela dit, j’aime bien provoquer, car cela permet des discussions animées. Je propose donc de lancer le débat...

1. Les hobbys apportent peu d’informations. Pourquoi?

Très souvent, les hobbys mentionnés sont la lecture, le cinéma, la cuisine ou les amis. Quelle énuération ennuyeuse! Peut-être pensent-ils être obligés d’indiquer des hobbys donc ils mentionnent ces activités pour la bonne forme. D’un autre côté, je suis persuadé que chaque être humain est unique. Il est donc possible qu’ils n’osent pas indiquer ce qui les passionne vraiment... Imaginez qu’à la rubrique hobby vous trouvez: Heavy Metal et Game of Thrones! Le recruteur pourrait en déduire que la personne regarde des séries TV à longueur de nuits, qu’il pourrait potentiellement être violent le lendemain matin au bureau! Donc voilà. Les voyages, la nature et les timbres ne sont finalement pas une si mauvaise idée.

2. La protection des données ne le permet pas

Je ne suis pas un spécialiste du droit du travail, mais si j’ai bien compris, un recruteur n’est en droit de poser des questions qui concernent uniquement l’activité professionnelle pour laquelle la personne postule. Savoir qu’un libraire va souvent au cinéma, qu’un informaticien aime faire la cuisine ou qu’un manager RH rencontre régulièrement ses amis... n’apporte pas d’informations très utiles! Ou peut-être suis-je en train de manquer une dimension importante. Je me réjouis de lire ce que pense ma collègue Leandra Moser.

3. Les hobbys jouent parfois en défaveur du candidat

J’ai déjà mentionné le cas du fan de metal... Mais d’autres hobbys «plus sérieux» pourraient aussi se retourner contre le candidat. Voici quelques exemples:

  • Celui qui ne pratique pas un sport d’équipe pourrait être considéré incapable de travailler en équipe.
  • Ne fait pas de sport du tout = est souvent malade.
  • S’engage en politique ou dans le milieu associatif = ne sera pas engagé à 100% dans son job.
  • Donne des cours de Zumba deux fois par semaine = ne sera pas flexible du tout ces deux soirs de semaine et ne pourra pas faire d’heures supplémentaires en cas d’urgence.

Pour toutes ces raisons, je suis pour supprimer la mention des hobbys dans un CV. Ces activités ennuient très souvent le recruteur et peuvent stresser inutilement le candidat qui hésiterait à mentionner une activité qui risque de jouer en sa défaveur.

Contre: Leandra Moser

En règle générale, les CV prévoient en fin de document un espace pour indiquer les hobbys et les intérêts non-professionnels du candidat. Si je suis honnête avec vous, je survole en général cette partie, car ces indications auront peu d’impact sur ma décision. Je les utilise surtout dans un deuxième temps, au moment de préparer l’entretien d’embauche, car ils sont souvent une porte d’entrée dans la discussion. Mais une chose à la fois.

1. Les hobbys apportent peu d’informations. Pourquoi?

Je comprends bien l’argument d’Etienne Besson. C’est vrai, les candidats remplissent très souvent cette partie de manière très formelle, afin de ne surtout pas causer de vagues. Au lieu de «lecture» ou «musique», je préférerais connaître ce que les candidats lisent ou écoutent... Et en quoi ces hobbys vous passionnent? Ce qu’ils vous apportent? Et là, ces indications à première vue banales deviennent riches en enseignements. Les erreurs d’appréciations sont vite faites et le risque n’est pas négligeable d’estampiller un candidat d’une fausse étiquette. Mais je fais confiance aux recruteurs, ils savent très bien gérer ce genre d’informations.

2. La protection des données ne le permet pas

Moi non plus, je ne prétends pas être une experte du droit du travail. Mais si j’ai bon souvenir, quand un candidat mentionne des éléments sur son CV, le recruteur est en droit de lui en parler. Si le CV ne contient aucune information sur les hobbys du candidat, je ne pose pas de questions.

3. Les hobbys jouent parfois en défaveur du candidat

Je ne suis pas très à l’aise avec ce troisième argument (je vous l’accorde). Tirer des conclusions sur la personnalité de quelqu’un en interprétant ses hobbys et sans l’avoir jamais rencontré est, à mon avis, inacceptable. Comme je l’ai dit plus haut, parler des hobbys d’un candidat est une excellente manière d’entrer en relation avec lui ou elle. En tant que recruteur, si j’estime qu’il y a des hobbys «idéaux» vs des hobbys «à proscrire» je n’ai rien compris au métier et je ne suis probablement pas à ma place. Essayons au contraire d’évaluer une personne dans sa globalité, et non la réduire à un descriptif de poste et à une fonction en organisation. Chacun est libre de disposer de son temps comme il l’entend. Chacun choisit librement les activités qui vont lui permettre de trouver un équilibre de vie sain. Je ne m’autoriserais pas à juger ces choix. Car au final, nous souhaitons tous être traités comme des êtres humains.

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Etienne Besson est conseiller en personnel depuis 1998. Pendant son temps libre, il aime surfer sur Internet où il partage volontiers ses Tweets et aime chicanner ses amis sur Facebook. Il écrit aussi des articles sur le thème du recrutement.

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Leandra Moser est DRH chez Netstream (prestataire d’infrastructure IT). Elle a effectué ses premiers pas dans le recrutement à 23 ans, auprès de la start up Academics4business. Depuis, elle n’a jamais perdu son intérêt pour ce sujet.

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