03.05.2016

Entre 20'000 et 50'000 emplois supprimés en Suisse en 2015

Plus de 20'000 emplois ont été supprimés en Suisse en 2015, selon la présidente d'Unia. Certaines études parlent même de 50'000 postes perdus, ajoute Vania Alleva dans une interview publiée le 1er mai dans le Matin Dimanche.

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Berne (ats) La syndicaliste impute ces suppressions d'emplois au problème du franc fort. Celui-ci a aussi des répercussions sur les salaires ou le temps de travail tant dans l'industrie que dans l'hôtellerie et le commerce de détail, relève Vania Alleva.

Mais le franc fort n'est pas seul. Et la présidente d'Unia de citer "l'incertitude liée à la mise en application du 9 février (initiative acceptée de l'UDC contre l'immigration de masse) qui empêche les entreprises d'investir".

La mise en place de mesures d'accompagnement n'en devient que plus nécessaire: davantage de protection des salaires et des conditions de travail, selon les syndicats.

Dans le domaine particulier du commerce de détail, la signature d'une convention collective nationale de travail est réclamée avec d'autant plus de vigueur que c'est là le seul moyen de protéger vraiment les salariés, affirme la syndicaliste. Mme Alleva s'exprime dans un contexte de menace de référendum contre la libéralisation des horaires d'ouverture des magasins, dont 96% des salariés de la branche ne veulent pas, selon une enquête d'Unia.

Manifestations dans plus de 50 localités

Les manifestations du 1er Mai ont eu lieu dans plus de 50 localités suisses, malgré la pluie. Sous la houlette des syndicats, des milliers de personnes ont dénoncé le démantèlement des rentes et l'injustice sociale causés par la majorité de droite au Parlement.

Présent à Aarau pour les festivités, le conseiller fédéral Alain Berset a défendu une AVS forte et stable, pilier central de la justice sociale en Suisse. Dans le cadre de la réforme de la prévoyance vieillesse, il faut trouver une solution qui inspire la confiance de tous, a lancé le ministre en charge du Département fédéral de l'intérieur (DFI).

Et de rappeler qu'augmenter l'âge de la retraite ne fera qu'augmenter le nombre de chômeurs âgés et des bénéficiaires de l'aide sociale.

Sa consoeur socialiste au sein du collège, Simonetta Sommaruga, s'est elle rendue à la clinique gynécologique de l'hôpital cantonal de Winterthour (ZH). Elle y a rencontré le personnel soignant et s'est enquise de ses conditions de travail au sein de l'hôpital, notamment concernant les horaires irréguliers.

Le temps partiel a également été abordé, de nombreux employés de l'établissement étant dans ce cas, même dans les plus hauts postes. "Ceci devrait être une évidence", a déclaré la conseillère fédérale. Selon elle, il est nécessaire que les employeurs encouragent le temps partiel. Il en va de l'harmonie entre vie privée et professionnelle des travailleurs.

Baisse "dramatique" des rentes

Lors d'un discours à Thoune et Spiez (BE), où le 1er Mai a déjà été fêté samedi, le président de l'Union syndicale suisse (USS) Paul Rechsteiner a déclaré que "les rentes des caisses de pensions sont toujours plus mauvaises, au point que c'en est parfois dramatique. Et cela surtout pour les futurs retraitées et retraités".

Corrado Pardini, conseiller national (PS/BE) et membre du comité directeur d'Unia, a dénoncé dans son allocution à Interlaken (BE) la politique bourgeoise de démantèlement social et les attaques néolibérales contre la prévoyance vieillesse.

En opérant des coupes dans les assurances sociales, l'UDC et le PLR incitent les gens à s'assurer à titre privé, "un 'business' se chiffrant en centaines de milliards de francs". Il a aussi rappelé que 90% de la population tirent la majeure partie de leurs revenus du 1er pilier, d'où l'importance d'une AVS forte.

Le PLR fribourgeois se mobilise

Du côté des partis, le président du Parti socialiste (PS) Christian Levrat a critiqué les innombrables "décisions glaciales" de la majorité de droite au Parlement qui vont à l'encontre des intérêts des citoyens suisses: l'âge de la retraite à 67 ans ou le pouvoir donné aux caisses maladie, notamment. Ce "froid" règne depuis le virage à droite pris lors des élections en octobre, écrit-il dans la lettre d'information du PS.

Alors que M. Levrat fustige les partis de droite, les libéraux-radicaux fribourgeois se sont mobilisés pour la Fête du travail. Ce 1er Mai tombant un dimanche, la section cantonale s'est rendue auprès de ceux qui travaillent durant les jours fériés, comme les employés dans les hôpitaux, homes ou restaurants. Le PLR veut ainsi montrer sa reconnaissance envers ces personnes qui assurent le bon fonctionnement des services utiles à chacun, écrit-il dans un communiqué.

Pas de débordements à Genève

A Genève, environ 1500 personnes ont bravé le froid pour les retraites et contre l'austérité. Le cortège s'est déroulé sans accroc malgré un retard dû à une vingtaine de jeunes militants anticapitalistes. Ils refusaient de se faire fouiller par la police. Encerclés par le même nombre de policiers, ils ont pu finalement rejoindre les rangs des manifestants.

Cagoulés et réfugiés derrière des parapluies, une centaine de jeunes anticapitalistes et antifascistes du Bloc révolutionnaire ont crié leur opposition à la police. Aucun problème n'a été constaté, malgré les craintes des forces de l'ordre depuis les importants dégâts mi-décembre en marge d'une manifestation non autorisée.

Tout au long du rassemblement, les discours ont repris le mot d'ordre axé sur la défense des retraites. Les manifestants ont affiché leur soutien à l'initiative AVSplus qui revaloriserait de 10% les rentes, à l'image des banderoles "Ensemble pour une AVS plus forte" qui les accompagnaient.

Déprédations à Zurich

A Zurich, les manifestations ont connu quelques débordements. Environ 30 personnes issues du milieu d'extrême gauche ont perturbé le cortège des syndicats, qui rassemblait près de 10'000 personnes. Les groupements incriminés ont sprayé les bâtiments de l'administration communale et de la police cantonale et cassé des vitrines de restaurants et commerces au centre-ville. Les dégâts se montent à plusieurs dizaines de milliers de francs.

La Fête du travail échauffait les esprits dans la ville de la Limmat depuis deux jours. La police a fait état de déprédations dans les arrondissements 2 et 4 dans la nuit de samedi à dimanche. Un casier de la gare Enge a été détruit vraisemblablement à l'aide d'un engin pyrotechnique. L'incident n'a pas fait de blessé, mais le périmètre a été bouclé. Les dégâts s'élèvent à plusieurs milliers de francs.

Par ailleurs, des murs pare-vue sur le site des casernes ont été souillés durant cette même nuit à coups de spray. Vendredi soir, une manifestation avait dégénéré et entraîné l'arrestation de certains protestataires.

A Bâle, environ 1000 personnes ont participé au cortège des syndicats, faisant fi de la pluie battante. La Place fédérale à Berne a elle été le point de rencontre de plusieurs centaines de manifestants. Du côté de Bienne, les festivités ont rassemblé environ 250 personnes sur l'Esplanade du Palais des Congrès, où le conseiller d'Etat vaudois socialiste Pierre-Yves Maillard a tenu un discours.

Manifestations dans le monde, incidents à Istanbul

"Contre la pauvreté salariale et sociale", les manifestations traditionnelles du 1er mai se sont déroulées à travers le monde. La journée a donné lieu à des échauffourées à Istanbul, et s'est déroulée dans un climat tendu à Paris, où ont éclaté des incidents.

A Istanbul, la police a utilisé des gaz lacrymogènes et des canons à eau pour disperser des manifestants en plusieurs endroits de la plus grande ville de Turquie, notamment autour de la célèbre place Taksim, foyer traditionnel de protestation.

En marge de ces échauffourées, un homme est mort écrasé accidentellement par un véhicule antiémeute, en traversant une rue du centre-ville, selon la police. Une trentaine de personnes ont été interpellées, selon l'agence de presse pro-gouvernementale Anatolie.

Des militants du Parti démocratique des peuples (HDP, prokurde) ont également été dispersés par la police, qui a mobilisé près de 25'000 hommes et bouclé de nombreuses rues en prévision de la fête du Travail, souvent l'occasion de heurts entre militants opposés au pouvoir et forces de sécurité.

A Ankara, la police a arrêté quatre Syriens, djihadistes présumés appartenant au groupe Etat islamique (EI), soupçonnés de préparer une attaque contre ces célébrations. Les manifestations du 1er mai ont également été interdites dans les villes d'Adana et Sanliurfa (sud) après des informations reçues par les autorités sur de possibles attaques suicides.

En France, la fête du Travail se déroulait dans un climat particulièrement tendu, après deux mois de contestation contre un projet de loi sur le travail et de nombreuses manifestations émaillées de violences. Un défilé unitaire des syndicats, réunis pour la première fois en sept ans, a débuté vers 14h30 sous haute surveillance policière, et des incidents ont éclaté peu après.

Quelque 70'000 personnes ont défilé à Paris, selon la CGT, 17'000 selon la police.

Le gouvernement français avait adressé une ferme mise en garde aux éventuels "casseurs", et prévu toute une série de mesures pour éviter les débordements. Plusieurs milliers de personnes ont défilé dans le calme dans plusieurs grandes villes de province.

En Russie, près de 100'000 personnes selon la police ont participé à Moscou à une grande parade organisée sur la Place Rouge, brandissant drapeaux et ballons sous les murs du Kremlin, rappelant les grandes parades de la défunte URSS.

En Pologne, un cortège de quelques centaines de manifestants, réunis à Varsovie à l'appel du syndicat OPZZ et du parti de gauche SLD, a défilé dans le calme à travers la capitale où d'autres petits défilés de gauche ont également eu lieu.

A Madrid, plusieurs milliers de personnes, dont les leaders du Parti socialiste Pedro Sanchez et du parti écolo-communiste Izquierda Unida Alberto Garzon, ont défilé dans un cortège mené par les deux principaux syndicats CCOO et UGT. Ils avaient déployé une banderole proclamant : "Contre la pauvreté salariale et sociale, du travail et des droits".

En Italie, une manifestation unitaire des trois principaux syndicats (CGIL, CISL et UIL) s'est déroulée dimanche matin, sous la pluie et sans incident, dans les rues de Gênes (nord-ouest), en présence d'environ 5000 personnes.

Quelque 600'000 Cubains ont défilé, selon la presse officielle, dénonçant une campagne pour "déstabiliser" les gouvernements de gauche en Amérique latine, notamment au Brésil et au Venezuela.

En Corée du Sud, des dizaines de milliers de personnes ont protesté contre une réforme annoncée des conditions de travail, projet du président Park Geun-Hye et de son parti conservateur, qui prévoit de faciliter les conditions de licenciement.

La journée des travailleurs, célébrée dans de nombreux pays, est née à Chicago en 1886 à l'initiative d'un mouvement syndicaliste réclamant la journée de travail de huit heures.