23.05.2016

Il faudra des emplois de qualité pour bannir la pauvreté d'ici 2030

Près de 10'000 milliards de dollars seront nécessaires pour atteindre l'objectif d'éradiquer la pauvreté dans le monde d'ici 2030, selon l'OIT. Un tiers de ce montant ne pourra être obtenu qu'avec des emplois de qualité.

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Genève (ats) "Le monde a fait des progrès significatifs" dans la lutte contre la pauvreté, a affirmé devant la presse à Genève le directeur général de l'Organisation internationale du travail (OIT) Guy Ryder.

Près de 2 milliards de personnes vivent avec moins de 3,10 dollars par jour. Soit un peu plus de 35% de la population des pays émergents et en développement, un taux réduit de moitié dans les 25 dernières années.

Mais cette avancée est "inégale et fragile", a indiqué M. Ryder en présentant le rapport "Transformer l'emploi pour en finir avec la pauvreté". Elle a été constatée en Chine et en Amérique latine, mais la pauvreté reste élevée en Afrique, dans certains pays asiatiques et en Europe.

Pour atteindre l'Objectif du développement durable (ODD) d'éradiquer la pauvreté, 600 milliards de dollars (environ 590 milliards de francs) par an seront nécessaires pendant 15 ans, dont deux tiers par la protection sociale et un tiers avec davantage d'emplois de qualité.

Ce montant constitue 0,10% du PIB mondial. Mais il atteint 21% en moyenne dans les pays en développement et jusqu'à près de 80% dans un pays africain. Les personnes pauvres constituent 30% de la population mondiale, mais ne reçoivent que 2% des revenus, souligne l'OIT.

Appel aux gouvernements

Près d'un tiers des habitants des pays émergents ou en développement disposent d'un emploi, mais souvent précaire. Les deux tiers de ces emplois sont liés à des activités agricoles peu productives. Dans les pays développés, plus de 80% des travailleurs pauvres sont salariés. M. Ryder souligne sur cette question que l'impact négatif des migrations est bien plus minime que les conséquences positives.

Dans la lutte pour changer la donne dans le monde, les pays exportateurs de ressources naturelles et de produits primaires ont enregistré le moins d'avancées, d'autant plus qu'ils s'appuient sur une économie rurale et informelle. Par ailleurs, la croissance économique ne garantit pas forcément la réduction de la pauvreté. Dans certains pays, elle a augmenté les inégalités.

Autre blocage dans certains Etats: un cadre institutionnel qui marginalise les groupes vulnérables. Les droits des travailleurs sont limités, les institutions ne sont pas solides, l'environnement est défavorable aux entreprises ou encore les gouvernements sont inefficaces voire corrompus. Les programmes sociaux n'atteignent alors souvent pas les pauvres.

Face à ces difficultés, l'OIT recommande d'améliorer la productivité des petits exploitants agricoles indépendants. L'accès au crédit, aux transports et aux marchés doit être étendu.

Politiques sociales et fiscalité

Mais il faut également doper l'économie rurale non agricole. Et promouvoir la transition vers l'économie formelle pour assurer aux travailleurs l'accès à la protection sociale, à un salaire minimum et aux aides aux revenus et à l'emploi. La formalisation élargit également les rentrées fiscales. L'OIT plaide pour des entreprises durables.

Les travailleurs doivent bénéficier de mesures qui renforcent leur santé, leur sécurité, les partenariats sociaux, la protection sociale et la lutte contre la discrimination. Mais le rapport cible des manquements dans la ratification ou le respect des conventions de l'OIT. Les entreprises privées doivent s'engager davantage et les gouvernements améliorer leur action.

L'accès à la justice doit être garanti et les représentants des partenaires sociaux défendus. Des synergies dans les politiques sociales et de l'emploi peuvent être renforcées par le dialogue social.

Tout ce dispositif ne demande pas des ressources conséquentes mais un réaménagement, affirme l'OIT. Outre les rentrées liées à une économie plus formelle, la lutte contre la concurrence et l'évasion fiscales peut permettre de réduire la pauvreté. Les nouvelles technologies y contribuent aussi.