20.06.2016

Travail.Suisse déplore une nouvelle flambée des bonus

L'écart salarial s'est aggravé en 2015 comme jamais depuis cinq ans, malgré l'acceptation de l'initiative sur les rémunérations abusives. Travail.Suisse appelle les autorités politiques à mettre un terme à ces excès.

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Berne (ats) Les patrons s'accordent des hausses substantielles alors que dans la tranche des bas revenus la pression sur les salaires, l'insécurité et la peur de perdre son travail ne cessent de croître, a dénoncé Travail.Suisse dans son étude présentée à Berne et menée pour la douzième année consécutive.

Les salaires des dirigeants ont fait un grand bond en avant en 2015. L'écart salarial s'est accentué dans 19 entreprises sur les 27 examinées par Travail.Suisse. L'indemnité du CEO a augmenté en moyenne de 15%. La première place de ce classement revient au patron de Credit Suisse, Tidjane Thiam.

Credit Suisse en tête

Sa rémunération s'est élevée à 20,3 millions de francs en tenant compte de la prime d'entrée en fonction qu'il a reçue sous la forme d'une compensation des bonus perdus auprès de son ancien employeur. Chez le numéro deux bancaire helvétique, l'écart salarial avec le plus bas revenu s'est creusé à 1:363.

Dans plus de deux tiers des entreprises examinées, l'écart salarial s'est accentué et on peut s'attendre à une nouvelle flambée des bonus, estime Travail.Suisse. Credit Suisse (1:363), UBS (1:275) et Roche (1:273) affichent des écarts salariaux similaires à ceux de 2010.

Ces résultats sont qualifiés de choquants par le conseiller national (PS/NE) Jacques-André Maire, vice-président de Travail.Suisse. On pouvait s'attendre à une certaine modestie étant donné le contexte économique morose, le franc fort et les efforts demandés aux travailleurs, affirme-t-il. "Les hauts salaires n'ont pas le moins du monde souffert de la force du franc", résume Adrian Wüthrich, président de l'organisation.

Méfiance vis-à-vis de l'économie

Les résultats montrent clairement que l'initiative Minder contre les rémunérations abusives est restée sans effet, souligne le syndicat. Selon Travail.Suisse, de tels écarts salariaux conduisent la population à prendre ses distances par rapport à l'économie.

La politique doit prendre de toute urgence des mesures afin de restaurer la confiance. Le syndicat plaide pour une révision du droit de la société anonyme afin d'empêcher le versement d'indemnités d'entrée en fonction et de départ.

L'ordonnance contre les rémunérations abusives dans les sociétés anonymes cotées en bourse (ORAb) empêche le paiement à l'avance d'indemnités. En revanche, les primes d'entrée en fonction, qui indemnisent le dirigeant des bonus perdus en raison de son départ de l'entreprise précédente, restent légales, note le syndicat.

Manque de volonté politique

Les instruments de contrôle prévus dans l'ordonnance fédérale sont notoirement insuffisants et il n'y a surtout pas de réelle volonté d'imposer des limites, déplore Jacques-André Maire.

Les votes lors des assemblées générales s'avèrent inefficaces. Seuls des votes séparés sur les indemnités fixes et les bonus peuvent faire sens, estime Gabriel Fischer, responsable de la politique économique chez Travail.Suisse. De plus, le vote sur les bonus doit être rétrospectif, c'est-à-dire avoir lieu durant l'année qui suit, lorsque les résultats de l'exercice sont connus. Ce qui est rarement le cas, précise-t-il.

Transparence fiscale

Comme il n'est pas possible de réunir une majorité politique pour limiter les hauts salaires, Travail.Suisse réclame l'introduction de la transparence fiscale et l'ouverture d'un débat politique sur la contribution de solidarité. "A défaut de limitation, la transparence fiscale pourrait peut-être atténuer quelque peu les sentiments de révolte de la population", estime Jacques-André Maire.

Le syndicat exige en outre l'abandon de la politique fiscale favorable aux entreprises. Travail.Suisse soutiendra le référendum sur la réforme de l'imposition des entreprises (RIE III), qui risque de faire perdre des milliards de recettes fiscales aux collectivités publiques.