Comment fidéliser les Y

Le spécialiste canadien de la génération Y Carol Allain brosse le portrait de la relève de nos organisations et donne ses clés pour créer une culture d’entreprise adaptée à leurs besoins.

L’avenir leur appartient. Dans une dizaine d’années, les organisations se tourneront vers la génération Y (nés entre 1979 et 1995) pour remplacer les baby-boomers (nés entre 1945 et 1961), partis à la retraite. Enfin, dans dix ans il sera déjà trop tard. Les observateurs assurent que la partie se joue maintenant. Et que les organisations qui adaptent aujourd’hui leur culture d’entreprise aux générations Y auront pris une longueur d’avance. 

HR Today a donc demandé à l’auteur*/conférencier/formateur canadien Carol Allain de vous livrer ses conseils pour fidéliser la génération Y. De passage en Suisse en mars dernier pour donner une série de conférences au CHUV et chez l’assureur la Vaudoise, Carol Allain nous accueille à l’Hôtel de la Paix à Lausanne. Svelte, chemise blanche impeccable, il est un interlocuteur intense. 

En parlant, il bouge dans tous les sens, gribouille des mots clés sur un bloc et cherche notre regard pour donner de l’émotion à un discours, dit et redit des centaines de fois. Mais au contraire de nombreux commentaires très négatifs, voire réactionnaires, sur la génération Y («des zappeurs gâtés en quête de bonheur qui vont se faire manger tout cru par les Asiatiques»), le discours de Carol Allain est positif. 

Il dit: «Les Y aiment le changement et la diversité. Ils sont capables de bouger sur des milliers de kilomètres. Ils sont ouverts sur le monde et la différence. Pour eux, ce n’est plus la sécurité de l’emploi qui est le moteur. Ils recherchent avant tout une expérience qui va les faire grandir. Cette aventure peut durer 3, 5 et même 8 ans. Mais elle peut aussi s’arrêter d’un coup net. Les Y s’expriment très bien. Ils sont capables de dire les choses comme elles sont. C’est d’ailleurs la première génération qui ose critiquer de front leurs parents. Le vocabulaire des Y est dialogue, négociation, compromis, permissivité et facilité. En entreprise, les Y sont très favorables à l’ouverture et à la diversité. Ils ont des valeurs: justice, écologie. Et vivent avec la conscience d’un monde globalisé». Alors comment adapter une culture d’entreprise à cette génération. Voici les 4 clés de Carol Allain. * 

Reconnaissance. «Les Y aiment gravir les échelons sur une période assez courte. Pour eux, deux ans c’est déjà très long. Ils recherchent une aventure différente tous les 18 mois. Le relationnel leur est très important. Ils ont besoin de beaucoup de considération et d’être vus et reconnus. Il faut donc aller régulièrement à leur rencontre. Ils ont besoin d’être rassurés plus souvent. Au-delà d’une rémunération, c’est la reconnaissance humaine qui les intéresse. Ils ont besoin d’entendre des mots, de recevoir des gestes qui leur sont, si possible, adressés en public. Comme ils sont très portés sur l’apparence, si vous leur faites un compliment devant l’assemblée, l’effet sera beaucoup plus fort. Mais la majorité des dirigeants ne sont pas très habiles avec cette communication. Je conseille des cours de théâtre, de se faire accompagner par un coach et de travailler leur relationnel.» 

Bien-être. «Au contraire des baby-boomers pour qui le discours, le sacrifice, l’éthique et la loyauté sont des valeurs très fortes, les Y apprécient les conditions subjectives du travail. Ils sont dans le sentiment, l’émotion et le bien-être. L’organisation doit donc passer de la verticalité vers l’horizontalité. Les Y recherchent le contact et la proximité avec leurs supérieurs. D’où l’importance du management de proximité. Pour eux, un regard de trois secondes les yeux dans les yeux représente énormément. Mais tout ceci est très émotif et ne colle pas bien avec l’opérationnel.» 

Leadership. «Les Y respectent avant tout la capacité des managers à influencer, à créer du sens et à créer de l’énergie. Ils ont besoin d’enthousiasme. Il s’agit donc beaucoup plus d’une capacité à polir et à raffiner qu’une question de processus ou de rendement. En d’autres termes, c’est la manière qui prime sur la matière, sur le produit. Pour convaincre un Y, il faut être capable de créer. Ce qui compte, c’est la magie, le style et le panache.» 

Compétence. «La définition de la compétence devient très importante pour les Y. Chez les baby-boomers, la compétence se définit par l’expérience et l’ancienneté. Chez les Y, la compétence réside dans le couple: image convaincante + réputation de gagnant. Un Y va observer la posture de son manager, sa façon de marcher. Ils seront attentifs à ce qu’il dégage en entrant dans une salle. Le Y fonctionne à l’œil. Le baby-boomer à l’oreille. Les Y carburent au spectacle, ils veulent des vedettes.» 

* Carol Allain est notamment l’auteur du «Choc des générations».

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Marc Benninger est le rédacteur en chef de la version française de HR Today depuis 2006.

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