Conseils pratiques

Habiletés relationnelles: de la théorie à la pratique

Dans des organisations de plus en plus horizontales, les soft skills des managers prennent de l’importance. Quelques pistes pour développer ces compétences humaines.

Tout le monde s’entend aujourd’hui pour dire que la maîtrise des tâches relatives à un emploi ne suffisent plus (50 % des licenciements des managers sont dus à des difficultés relationnelles) et que l’une des compétences des cadres de demain est la maîtrise des soft skills.

Les théoriciens qui ont analysé le fonctionnement des relations en entreprises sont clairs: il est urgent d’introduire du dialogue, de l’empathie, de la collaboration efficace, de l’esprit d’initiative, du courage managérial, etc.

De nombreuses formations, séminaires et coachings sont organisés pour traduire cette théorie sur le terrain. Or on constate que les choses vont à la fois vite et très lentement car les bonnes pratiques relationnelles subissent l’inertie de générations de personnes élevées avec peu de prise en compte de la dimension psycho-affective et que ces questions font encore très peur.

Pour développer les habiletés relationnelles, il faut connaître comment on fonctionne, ce qui implique de considérer la vie émotionnelle. Et il faut l’avouer, les injonctions à la mode ne font pas toujours très envie, s’entendre dire quand on est peu à l’aise avec les relations «il faut communiquer» a peu de chance d’être productif.

Ce n’est pas simple de passer d’un modèle d’organisation structuré principalement autour de la réalisation de tâches à un modèle plus collaboratif et solidaire. D’ailleurs, des termes comme «écoute» et «empathie» n’étaient tout simplement pas utilisés dans le vocabulaire grand public, ils étaient réservés à la relation d’aide et de soin. Tout comme le mot «créativité» très en vogue aujourd’hui ne faisait pas partie du vocabulaire de l’entreprise traditionnelle, mais était cantonné à l’univers de la mode et des professions artistiques. C’est donc d’un changement culturel dont il s’agit. C’est comme grandir dans un pays avec ses us et coutumes et partir s’installer ailleurs, il faut un peu de temps pour comprendre comment ça fonctionne et avoir envie de changer.

Concrètement, où est la difficulté?

Les soft skills sont inhérents à l’être profond, ce sont les qualités personnelles et interpersonnelles développées au cours d’une existence. C’est le résultat d’une éducation, d’un vécu et d’un parcours. Nous aimerions tous être très flexibles, bon communicants, efficaces et créatifs. Mais qu’est-ce qui fait que ce n’est pas si simple? Ces compétences sont encore peu enseignées et peu valorisées dans les cursus scolaires traditionnels. Il n’y pas d’éducation aux émotions et peu d’encouragement à développer sa propre créativité.

Parler de soi met encore mal à l’aise beaucoup de gens. La conférencière Geneviève Morand préconise de commencer les réunions en se livrant chacun sur «comment on se sent ici et maintenant». Mais cela crée parfois de la gêne, même au sein d’équipes d’institutions psycho-sociales. Nous sommes empruntés, surpris, cela ne nous est pas naturel, car n’ayant pas appris à le faire cela génère vite un sentiment de honte.

D’autre part, les émotions peuvent être effrayantes, car nous ne savons pas qu’en faire! Personne n’aime quand elles s’invitent, nous sentons bien que quand elles sont là, nous fonctionnons moins bien, notre esprit perd en clarté, nous pouvons nous sentir parasité. Mais plus on a l’impression de les subir, plus elles sont dérangeantes et risquent d’interférer dans le travail et dans les relations aux collègues et aux clients. Il faut donc trouver le moyen de «faire avec» le plus harmonieusement possible. Et s’habituer à y être attentif, car moins on s’en occupe, plus elles perturbent.

Alors comment faire?

  1. Avoir conscience que le stress et les émotions négatives entravent les bonnes relations et se transmettent rapidement.
  2. Savoir que la vie privée est une source de stress élevé qu’on amène avec nous au bureau et qui, cumulé à celui de l’entreprise, peut nous rendre plus sensible.
  3. Prendre conscience au maximum de son propre état interne, plusieurs fois par jour, notamment avant un rendez-vous, un entretien, une séance dont l’enjeu est important pour ne pas risquer d’être trop réactif. Et surtout, ne pas empiler les tensions émotionnelles les unes sur les autres.
  4. Prendre du temps pour réfléchir aux relations les plus tendues, qu’elles soient familiales ou professionnelles, afin d’envisager des solutions pour les détendre. Par exemple, un comportement agressif cache bien souvent une frustration ou une peur, c’est important de pouvoir décoder le discours caché et ne pas répondre à de l’agressivité par de l’agressivité.
  5. Entre deux entretiens, coups de fils, décisions à prendre, se donner 90 secondes pour faire la transition dans les pensées et dans les émotions. Rien de pire que d’arriver à un rendez-vous important encore préoccupé par l’interaction précédente.
  6. Avoir conscience de qui ou quoi génère facilement des émotions négatives en soi, le savoir permet de prendre un peu de recul et/ou d’anticiper. «Réfléchir les choses, c’est déjà mettre en mouvement et amorcer le changement» (citation de Françoise Kourilsky, psycho-politologue).
  7. Se demander quelle est notre réponse personnelle au stress (fuite, passivité, agressivité, autre) et essayer de le faire baisser quand il commence à monter.
  8. Trouver ses propres moyens de régulation émotionnelle (sport, interlocuteur de confiance, massage, marche, respiration, médiation, musique, etc). La respiration notamment calme l’émotion immédiatement. Cela a déjà été dit, mais ça marche.
  9. Quand il est évident qu’un collaborateur n’est pas dans son assiette, se mettre à son écoute totalement pendant quelques minutes (sans penser à autre chose, sans juger, sans dégainer un conseil), puis passer aux questions purement professionnelles.
  10. Si on est préoccupé par quelque chose (problème de santé, de famille, ou autre) oser se livrer succinctement à certains collègues, sans trop s’épancher. Cela soulage de pouvoir partager un souci et c’est une marque de confiance faite à l’interlocuteur, c’est bon pour la relation.
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Danièle Dominicé est coach d’hommes et de femmes occupant des positions dirigeantes. Elle offre un accompagnement personnalisé pour les aider à relever leurs multiples défis profes­sionnels et rela­tionnels. Lien: www.ddominice.ch

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