Le développement durable

"Santé, formation, relations humaines, management participatif, tout se tient"

Pour cerner la diversité des politiques de développement durable de trois entreprsies de Suisse romande, de taille et de secteur d’activité différents, HR Today a suivi le livreur de la start up fruitsfrais.ch. De la récupération des matériaux recyclables au style de management en passant par les programmes de santé/sécurité, le spectre est large. Reportage. 

 

C'est donc autour d'un carton de fruits qu'on va parler de développement durable. Lancée en février dernier, la start-up fruitsfrais.ch, crée par Frédéric Roger et Carmelo Castro, fait un carton en Suisse romande. Plus de quatre mille cinq cents box distribués à ce jour dans plus de 300 sociétés. Rebondissant sur une recommandation de Santé suisse, qui conseille un fruit et un légume par jour, ces deux entrepreneurs surfent sur la vague du développement durable. HR Today a suivi un de leurs livreurs pour sonder les politiques de développement durable de trois clients. Reportage.

Moudon, 8h15, lundi 22 juin.

Grand soleil. Au fond d'une impasse, dans la zone industrielle de Préville, voici le siège d'Edelvia. Numéro deux suisse du marché des fontaines à eau, l'ancienne enseigne Cristalp-Fontaine (ex-groupe Nestlé Waters, via Henniez) est devenue Edelvia en 2008 à la suite d'un management buy out. On pousse la porte et trois femmes rivées sur leurs écrans, le téléphone scotché à l'oreille, hochent la tête en signe de bienvenue. Puis déboule le CEO Cyril Halifi, 31 ans. La chemise blanche déboutonnée au trois-quart, le sourire dynamique, il nous offre un café et un verre d'eau puis se lance sans attendre dans un grand plaidoyer pour le développement durable: «L'industrie des boissons se préoccupe depuis longtemps d'environnement. Nous misons sur le recyclage de toutes nos matières (bouteilles en polycarbonate et gobelets en polypropylène). Les systèmes de refroidissement de nos fontaines sont sans gaz à effet de serre et consomment moins de 15 watt heure, c'est beaucoup mieux qu'un frigo que l'on ouvre régulièrement pour se servir un verre. Notre documentation est imprimée en Suisse. Les 100 000 gobelets écoulés chaque jour sont produits en Pologne». Puis le ton monte. Cyril Halifi en veut au politicien démocrate chrétien Jacques Neyrinck, qui a osé s'en prendre à l'industrie de l'eau en bouteille. «C'est facile pour lui, il préfère le vin», décoche le jeune CEO, agacé. «Je vis moi-même au centre-ville de Lausanne et l'eau du robinet y est imbuvable. Donc je bois de l'eau en bouteille et j'estime que c'est encore mon droit de choisir. Si je buvais des softdrinks, de la bière ou du vin, je serais quelqu'un de très bien aux yeux de Monsieur Neyrinck alors même que mon bilan écologique serait beaucoup plus néfaste. L'impact écologique de ma consommation est négligeable. Boire de l'eau en bouteille pendant une année, avec le système de distribution, d'emballage et de refroidissement Edelvia équivaut à conduire mon véhicule durant 70 km». L'argumentaire est bien rodé. Il poursuit: «Au contraire du PET, nos bouteilles en polycarbonate sont consignées, nettoyées et reremplies». Arrive le livreur. Sec sur jambe, cet employé du primeur en fruits et légumes Roduit SA, avec qui fruitsfrais.ch a récemment conclu un partenariat, ne s'arrête pas pour le café. Parmi la sélection du jour: des pêches plates. Une nouveauté. «Nous essayons de coller aux saisons tout en innovant un peu», sourit Frédéric Roger. Retour à Edelvia. L'organisation emploie 10 personnes à temps plein. Pour optimiser son bilan écologique, la société confie la distribution de son eau jusqu'à la porte de ses 7500 clients à un réseau de 150 dépositaires de boissons régionaux et indépendants, ce qui permet d'optimiser des routes existantes. Une entreprise pérenne? «Nous sommes une petite structure avec quatre actionnaires privés et une vision à long terme. Je dirige l'entreprise en bon père de famille. Ce qui use à tous les niveaux, y compris sur le plan humain, c'est la course en avant et les patrons qui perdent la dimension humaine. Pas de ça chez nous», sourit Cyril Halifi. Encore un sourire, une franche poignée de main, et on reprend la route. 

Granges-près-Marnand, 9h23.

Situé en plein cœur de la campagne vaudoise, le siège suisse du Groupe Minoteries SA surplombe le village de Granges-Marnand. Le bâtiment administratif, une ancienne bâtisse vaudoise rénovée, contraste avec les locaux cubiques d'Edelvia. Arrive Marianne Hasler, le rouge à lèvres assorti à son ensemble fuchsia. Le bureau des RH est à l'étage, on y retrouve Murielle Jaton. Les deux femmes, co-responsables RH, racontent: «Le Groupe Minoteries SA est actif dans la meunerie de blé tendre et dans la fabrication d'aliments secs pour chats et pour chiens. Deux cents personnes travaillent sur quatre sites de production, soit Granges-Marnand, Goldach, Sion et Schöftland. Ici, développement durable rime avec bien-être et santé de nos collaborateurs. La preuve: leur fidélité et leur fort engagement». De l'extérieur, on s'imagine des conditions de travail très pénibles. Vrai? «Le métier de meunier est mal connu. Ils travaillent sur des installations modernes dotées de technologies de pointe», corrige Murielle Jaton. Et sur le plan humain? «Nous sommes très attachées à nos valeurs. Nous fonctionnons comme une grande famille, dans le respect, la confiance et le partage des idées.» Les réalisations du département RH sont multiples: enquêtes de satisfaction, entretiens annuels, massages assis, bons de prévention pour financer soit une participation à un abonnement de fitness ou un massage thérapeutique. Et enfin, des fruits frais et un repas équilibré par semaine. Les deux responsables RH rayonnent. Marianne Hasler conclut: «La santé, la formation, les relations humaines, le management participatif, tout se tient.»

Lausanne, 11h00.

A quelques pas de la gare, le siège suisse de Conciliat, société de conseils en ressources humaines. C'est le directeur Franck Gerritzen en personne qui ouvre la porte. Le look impeccable, il nous amène en salle de réunion. Ambiance sérénité zen moderne. Il dit: «Conciliat est sensible au développement durable depuis longtemps. Comme nous sommes une société de service, nous avons donc dû réfléchir aux applications concrètes. La première touche à la localisation de nos bureaux. Qui sont toujours proches de la gare. Nous effectuons la plupart de nos transports en train.» Avec cela, ajoutez le recyclage du papier et les économies d'énergies: lampes et ordinateurs sont éteints tous les soirs. Et le management? «Mon style de gestion est très transparent. Tout le monde sait exactement ce qui rentre et ce qui sort. Cela a l'avantage de responsabiliser les collaborateurs.» La société emploie 24 personnes dans toute la Suisse, dont dix à Lausanne. Frank Gerritzen sourit: «La moyenne d'âge est de 26 ans et mon équipe adore le chocolat. Les corbeilles de fruits nous apportent donc un certain équilibre. J'ai même tenté d'introduire un jogging hebdomadaire. Sans succès.» Il nous montre les locaux. A noter que Conciliat partage l'étage avec une autre société du groupe Contaplus: William Elliott (recrutement vente et marketing). Les bureaux de chaque entité sont en open space. A notre passage, les consultantes, toutes de noir vêtues, viennent nous serrer la main. Devant un des écrans, les restes d'une pêche attendent patiemment sur un mouchoir en papier. En sortant, on remarque le carton de fruits du jour posé à côté de la photocopieuse. Il est vide. Il servira à récupérer le vieux  papier. 

 

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Marc Benninger est le rédacteur en chef de la version française de HR Today depuis 2006.

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