Débat

Faut-il soutenir davantage les employés avec des charges de care?

La prise en charge des enfants et des autres membres de la famille prend du temps. Mais dans quelle mesure les employeurs devraient-ils aider leur collaborateurs·trices? Trois experts en débattent.

Marc Prinz, avocat, Vischer SA

Ces dernières années, la question de la conciliation de la vie familiale et professionnelle a pris de plus en plus d'importance. Le législateur a aussi reconnu ce besoin et a mis en vigueur l'année dernière trois nouvelles dispositions relatives à la prise en charge des enfants ou des membres de la famille: le congé de prise en charge de trois jours pour la prise en charge de proches, c'est-à-dire d'un membre de la famille ou du partenaire atteint dans sa santé (art. 329h), le congé de prise en charge d'un enfant gravement atteint dans sa santé en raison d'une maladie ou d'un accident (art. 329i) et le congé de paternité (art. 329g CO).

Auparavant, les employeurs étaient également tenus d'accorder à leurs collaborateurs le temps nécessaire pour s'occuper de leurs enfants (malades) et des membres de leur famille (art. 36, al. 3, LTr, art. 324a CO et art. 329, al. 3, CO), mais dans une mesure plus limitée. À l'exception du congé de paternité, ces formes de congé se rapportent en général à des situations exceptionnelles.

Mais même au quotidien, il n'est souvent pas facile de concilier le travail et la garde des enfants ou des proches. Dans ce contexte, les salariés considèrent comme un avantage non négligeable le fait que l'employeur fasse des concessions en matière de garde d'enfants. Dans les grandes entreprises, cela peut aller de la mise en place d'une crèche – solution plus coûteuse – à des horaires de travail flexibles, souvent plus faciles à mettre en œuvre. Dans la mesure où l'entreprise le permet, les employeurs peuvent certainement augmenter leur attractivité avec de telles «offres de prise en charge» volontaires et motiver ainsi leurs collaborateurs. Une attitude plus conciliante de la part de l'employeur en matière de prise en charge des enfants et des proches devrait donc constituer une situation gagnant-gagnant pour l'employeur et les collaborateurs, mais aussi pour les enfants et les membres de la famille.

Nadine Schlegel, Lead Link People/HR, Unic

Nous ne «devons» pas, mais nous le «voulons»! Notre objectif est de construire des ponts et de trouver des solutions pour que la prise en charge des enfants ainsi que des autres membres de la famille soit possible pour nos collaborateurs. Nous essayons de les soulager dans cette phase et de ne pas leur imposer une charge supplémentaire. Notre intention est de répondre aux préoccupations et aux besoins des collaborateurs et de trouver une cohabitation qui fonctionne bien pour la personne concernée et pour nous en tant qu'employeur.

Il n'existe pas d'approche «one size fits all». Chaque situation est unique. En tant qu'employeur, il est important de tendre la main à un collaborateur pour trouver des solutions. Il ne s'agit pas d'une simple concession, mais plutôt d'une interaction et d'une harmonisation de la situation privée et personnelle avec les conditions professionnelles.

Qu'il s'agisse de la garde d'un enfant malade à la maison, de la fermeture de la crèche à court terme ou du besoin de soutien d'un parent: chez nous, les jours de congé payés pour les absences de courte durée vont de soi depuis longtemps et ne nécessitent pas d'autorisation. Nous voulons ainsi apporter notre contribution à la conciliation entre vie professionnelle et familiale. C'est pourquoi nous proposons des modèles de travail modernes avec une flexibilité individuelle dans l'organisation du temps et du lieu de travail. Il est ainsi possible de passer à un temps plein ou à un temps partiel à court terme, ou pour une durée déterminée. La possibilité de travailler à distance et d'aménager ses horaires de travail en fonction de ses besoins est également un soutien. Les congés payés et le rachat de congés supplémentaires, voire des congés non payés plus longs, sont également des éléments importants pour répondre aux besoins des collaborateurs et de leurs familles et proches.

Nous accordons une attention particulière à la reprise du travail après une longue pause. Par exemple, à la suite d’une maternité, un congé parental ou un congé non payé. Cette grande flexibilité en matière de temps de travail et d'aménagement du poste de travail est très appréciée et activement utilisée par nos collaborateurs. Il va de soi que nous mettons à la disposition de nos collaborateurs un environnement de travail digne de confiance. Nous créons les conditions cadres pour que la vie professionnelle et la vie privée trouvent leur place à parts égales.

Philippe Dutkiewicz, HR Strategies, HR Campus SA

Les enfants n’arrivent pas en douceur, ils font irruption dans votre vie comme des bombes. Même si tous les futurs parents y sont préparés, ils sont toujours surpris lorsque l'odeur des couches, la bouillie et les cris de bébé leur explosent à la figure. Ces turbulences diminuent certes lorsque les enfants grandissent. Le chemin parcouru avec eux devient alors plutôt un champ de mines. Un manque d'attention: une jambe cassée. Trop d’attention: ils tombent malades. Pas assez entourés: trop de joints fumés. Trop d’affection: fils à maman. Ce n'est vraiment pas facile.

Ce n'est pas la faute de l'employeur si les collaborateurs s'infligent volontairement ce genre d’épreuves. Les parents seront certainement absents, malades et/ou fatigués et ne feront peut-être pas toujours du travail leur priorité absolue. Pourtant, en tant qu'employeur, on gagne énormément à soutenir les parents et à voir les enfants comme quelque chose de positif. La raison est simple: les parents n'aiment rien de plus que leurs enfants. En tant qu'entreprise, il est donc d'autant plus important de prendre au sérieux les besoins des collaborateurs en ce qui concerne leur progéniture.

Cela ne signifie pas forcément de distribuer de l'argent ou des offres de garde. Les prendre au sérieux signifie avant tout leur donner de l'espace, car les changements explosifs ont besoin de place. Ainsi, après la naissance des enfants, il était important pour moi d'être présent à 100% pendant trois mois pour ma femme et mes enfants. D'autres collaborateurs souhaitent en revanche réduire leur temps de travail sur le long terme. D'autres encore ne peuvent pas être au bureau avant neuf heures à cause de la crèche. Mais à long terme, tout employeur qui pense que le travail est plus important que les enfants de ses collaborateurs est perdant. Rien n'est plus précieux que le temps passé avec ses propres enfants.

À la question: doit-on faire des concessions aux parents? Non, bien sûr, rien ne vous y oblige. On peut simplement s'en tenir aux dis- positions légales. Mais les jeunes parents sont aussi dans la période la plus productive de leur vie. Les bons collaborateurs peuvent en outre choisir leur employeur. C'est pourquoi les entreprises qui font des concessions aux parents auront tout simplement une équipe plus forte à moyen terme et joueront en première division. Celles qui ne le font pas joueront tout au plus en deuxième division. À vous de choisir.

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Texte: Marc Prinz

Marc Prinz, associé, Head of Labour and Employment, Vischer SA

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Nadine Schlegel est DRH chez Unic SA.

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