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Halte au RH-bashing!

Congé estival du Think tank et de ses membres, que je remercie de me laisser saisir cette opportunité pour rédiger un billet en nom propre... avec tout le recul, bien entendu, des échanges communs!
Avis aux professionnels des Ressources Humaines: demandez à des entrepreneurs de PME ce qu’ils pensent de votre fonction et vous serez probablement assez surpris, «déçus en bien». Non, pas de RH-bashing, pour reprendre un anglicisme en vogue. Loin des vitupérations venimeuses répandues dans les rangs des grandes organisations, les discours sont en tendance conciliants et favorables. A cela d’ailleurs, une raison fort simple: dans une PME, le DRH, c’est bien souvent l’entrepreneur lui-même. Et, en l’occurrence, on ne se jette généralement pas la pierre à soi-même...
 
Les esprits retors rétorqueront aussi sec: «Mais c’est précisément parce qu’ils n’ont pas eu affaire à ces ronds-de-cuir qu’ils se font aussi doux!». Qu’ils se détrompent. La plupart des chefs de PME ne sont pas nés de la cuisse de Jupiter: ex-employés, ex-cadres, fournisseurs ou clients, ils connaissent mieux que quiconque les réalités et apories de l’organisation contemporaine, qu’elle soit grande ou petite; et ce, département RH en tête.
Alors, pourquoi donc tant d’optimisme et de sympathie, à une heure où il est davantage de bon ton de piétiner la fonction?
 
Dans le cadre de 4HumanBeing, autour d’un café et en marge de nos débats plus fondamentaux, j’ai eu à plusieurs reprises le loisir d’écouter mes collègues et amis s’enquérir de telle ou telle personne, de telle ou telle situation dans leur entreprise. Il y avait dans leurs mots cette préoccupation juste –saine – que les choses se passent bien, que chacun y trouve de la satisfaction; une part de bonheur et d’honnêteté. Mais surtout, il y avait là des constats précis, établis avec discernement; des états de fait que seule la proximité autorise.
 
L’entrepreneur de PME, par la force des choses, se fait sociologue de terrain, observateur au premier plan des interactions qui se jouent au sein de son organisation. Il doit s’assurer que la dynamique des groupes s’opère, qu’agisse l’alchimie des relations. Ce n’est pas une option, mais une condition sine qua non de bon fonctionnement – et donc de pérennité – de la structure.
 
Dans une organisation de plus grande ampleur, échelle oblige, la charge ne peut être que déléguée: chef ou pas chef, impossible pour un seul homme de connaître et suivre distinctement un groupe de 500 comme de 10000 personnes! C’est d’ailleurs là l’essence des Ressources Humaines. Et quand on voit l’envergure et la difficulté de la mission, un peu de compréhension et de tolérance s’impose.
 
Vulgate des temps modernes, le RH-bashing – exutoire bancal des frustrations individuelles – s’offre à nous comme le triste reflet d’un échec collectif, désenchantement d’un monde professionnel que nous n’avons su et ne sommes en mesure de façonner pleinement. Toutefois, ce discours est néfaste, stérile. Il faut résolument s’y opposer.
 
Pour reprendre Dubar et Tripier, aucune profession n’est censée être ni «séparée», ni «unifiée», ni «établie», ni «objective». Fruit des mutations économiques à travers les âges, les Ressources Humaines n’échappent pas à la règle: elles ne peuvent être décontextualisées et n’offrent pas une singularité intrinsèque. Si le regard qu’on porte sur la profession n’est pas tendre, tout cela n’est que circonstanciel. Même si le sigle est probablement à repenser, gageons toutefois sur le fait que les RH, un jour, auront l’occasion de redorer leur blason. Car, fondamentalement, nous en avons tous besoin: c’est la préoccupation de l’humain dans l’organisation dont il est question!
 

4HumanBeing

4HumanBeing est un think tank (sans visées commerciales) constitué en 2013 par un groupe d’entrepreneurs de PME romandes autour d’un axe principal de réflexion: la meilleure promotion de l’humain dans l’entreprise et la proposition d’une alternative à la pensée RH dominante.

Membres fondateurs: Penda Coulibaly (Ampersand World SA), Claire Matias (Expert’Eyes), Pascal Mino (Mino SA), Damien Gentilhomme (GR Creative SA), Cyrill Borgeaud (Metrisis SA), David Gerosa (Rhônalia SA) et Raphaël Bennour (Rhônalia SA). En partenariat avec HR Today, 4HumanBeing souhaite diffuser ses idées et stimuler le débat dans la communauté RH de Suisse romande.

 

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Raphaël Bennour, ancien cadre RH d’une grande banque privée de la place genevoise, dirige le groupe CAVEA (en­ seignes Rhônalia et Vinograf, actives dans la distribution de vins et spiritueux haut de gamme) qu'il a co­créé en 2009. Consultant indépendant depuis 2016, il accompagne aussi les entreprises du secteur bancaire dans les défis actuels de la filière (digitalisation, marketing de l'offre, conduite du changement).

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