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Immigration: oui, mais...

Les services suisses de l’emploi sont dans une situation critique: une bonne main-d’œuvre en provenance de l’étranger est une urgente nécessité, mais l’immigration ne rencontre pas suffisamment d’acceptation au sein de la population. Lors du staffingday du 17 juin 2013, la discussion a été vive au sujet des tensions créées par l’immigration.

C’est un fait. La part de la population qui ne détient pas de passeport helvétique dans notre pays a fortement augmenté au cours des dernières décennies. Si la branche du travail temporaire a connu une forte croissance, elle le doit essentiellement aussi à la main-d’œuvre étrangère. En 2012, le nombre d’étrangers parmi les intérimaires a de nouveau augmenté pour atteindre 62 pour cent. En comparaison, la proportion des étrangers au sein de toute la population active se situe à peine à 24 pour cent.

Cette évolution dépend d’une croissance économique qui a généré 600'000 postes durant les dix dernières années. Il y a dix ans, la branche du travail intérimaire réalisait 3 milliards de chiffre d’affaires alors qu’aujourd’hui, elle en est déjà à près de 6 milliards de francs. Face à cette économie très florissante, l’offre de main-d’œuvre suisse est cependant relativement restreinte. Autrement dit: dans de nombreuses branches, il y a pénurie de main-d’œuvre spécialisée. Les entreprises suisses recrutent donc de plus en plus à l’étranger. Pour se procurer cette main-d’œuvre spécialisée, elles ont besoin du soutien des services de l’emploi.

Mais au fil du temps, la population exprime toujours davantage de réserves en ce qui concerne cette population croissante d’étrangers. Cette situation préoccupe les services de l’emploi.

Il y a immigration et immigration

La population ressent avant tout un malaise envers les étrangers dont la culture se différencie nettement de la nôtre et de ceux qui, de surcroît, sont sans activité lucrative. C’est la conclusion à laquelle est parvenue la toute récente étude de swissstaffing concernant les peurs éprouvées par la population face à la migration1. Cette analyse renforce ainsi le résultat de diverses autres études: en principe, les Suisses n’ont pas peur de l’immigration sur le marché du travail. Limiter la libre circulation des personnes, invoquer la clause de sauvegarde, refuser l’extension à d’autres Etats tiers, toutes ces mesures ratent toutefois leur cible car elles tentent de limiter l’immigration sur le marché du travail.

Bien au contraire, la politique suisse doit s’efforcer de contrôler les effets indésirables de l’immigration, d’une part pour répondre aux besoins de la population et, d’autre part, pour permettre une approche différenciée de la situation. En tout état de cause, une chose est claire: les entreprises suisses ont besoin de la main d’œuvre-qualifiée arrivant de l’étranger. Mais pour que l’immigration de ces forces de travail se passe dans de bonnes conditions, plusieurs moyens sont à disposition: mesures d’accompagnement, contingents des Etats tiers, extension des conventions collectives de travail.

La CCT Location de services: efficace, mais non sans lacunes

«Nous devons prendre au sérieux le malaise ressenti par la population face à l’immigration. Avec la nouvelle convention collective de travail Location de services, la branche du travail temporaire assume sa responsabilité de partenariat social», assure Charles Bélaz. La CCT Location de services est en vigueur depuis le 1er janvier 2012. Elle fixe des standards minimums obligatoires pour le travail temporaire et protège le marché du travail contre le dumping salarial. La CCT Location de services est un instrument efficace pour une immigration réglementée sur le marché du travail. Ainsi est-il d’autant plus important d’optimiser en continu cette CCT et d’en combler les lacunes.

Les non-membres de swissstaffing réalisant une masse salariale inférieure à 1,2 million de francs ne sont pas automatiquement assujettis à la CCT Location de services à l’heure actuelle. C’est pourquoi la CCT n’a pas pu empêcher totalement le dumping salarial, précisément dans des régions frontalières. swissstaffing met tout en œuvre pour combler cette lacune. Les négociations pour le renouvellement de la CCT Location de services ont déjà commencé.

Responsabilité des employeurs

En même temps, les employeurs doivent bien être conscients qu’ils ont une grande influence sur l’immigration: ce sont eux qui décident qui passera la frontière pour occuper un poste et combien de temps le travailleur pourra rester en Suisse. «Les employeurs doivent assumer leurs responsabilités – lors du recrutement, de la demande du permis de séjour et pour l’intégration de leurs travailleurs», souligne Regula Rytz, coprésidente des Verts, lors de la discussion. Le but doit être d’empêcher dans une très large mesure les abus tels que le dumping salarial ou le chômage chez les immigrants. Car ceci contribue du même coup à l’acceptation de l’immigration.

Nombreux sont les petits rouages qui font tourner le modèle à succès qu’est la Suisse. Notre marché du travail libéral a été et est la clé de ce succès. L’immigration dans de bonnes conditions l’est aussi. swissstaffing s’y engage pleinement.

1 Les peurs ressenties par la population suisse face à la migration. Une étude mandatée par swissstaffing. Ruedin, D., D‘Amato, G., Wichmann, N., Pecoraro, M. (2013). Université de Neuchâtel, Swiss Forum for Migration and Population Studies.

Traduit par Pierre Prince (Tradulex)

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JB

Julia Bryner est responsable Opérations & services aux membres chez swissstaffing.

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