Interview

«L’objectif est de vacciner 220’000 personnes d’ici la fin juin»

Responsable RH de la Task Force COVID de l’Etat de Fribourg, David Berclaz raconte ici comment son équipe organise la campagne de vaccination. L’expert RH Jean-Marie Minelli l’accompagne dans cette mission.

La cellule RH de la task force COVID du canton de Fribourg a été crée le 21 décembre 2020. Racontez-nous les premières semaines de votre activité?

David Berclaz: Cette cellule RH a été constituée pour le plan de vaccination. L’objectif est de vacciner 220’000 personnes d’ici la fin juin, soit 70% de la population fribourgeoise. Dans un premier temps, nous avons dû créer une vision, définir les rôles et le budget, puis mettre en place un processus de recrutement, un appui administratif et des courroies de transmissions avec la task force sanitaire du canton.

Combien de temps a duré cette première phase?

DB: Cet amoncellement d’activité s’est fait en trois semaines. En parallèle, nous avons dû déterminer les rôles de chacun sur les deux sites (Forum Fribourg et Espace Gruyère) puis mettre en place des équipes mobiles dans les EMS (Etablissements médico-sociaux). Avant de lancer les premiers recrutements, nous avons également clarifié les profils et ajusté les grilles de salaires, conformément aux tabelles de l’Etat de Fribourg.

Combien de personnes étiez-vous pour régler tous ces détails?

DB: Nous étions trois. Moi-même (responsable RH), Jean-Marie Minelli (expert RH à 50%), et Valérie Pauchard (assistante RH). Dans un deuxième temps, nous avons engagé Lidija Milic (recrutement), Vincent Conus (planificateur), Barbara Petrauskas (recruteuse senior à 50%) et Mélanie Coutelle (coordinatrice formation).

Certains cantons ont choisi de collaborer avec des agences de placement. Fribourg a choisi de monter sa propre cellule de recrutement. Pourquoi?

DB: Ce choix stratégique s’explique par le besoin du canton de subvenir à d’autres besoins RH dans la task force sanitaire: coaching, stratégie organisationnelle et planification stratégique des RH. Nous réalisons aujourd’hui que ce choix s’est avéré judicieux. Les problématiques RH dépassent largement les problèmes de recrutement. Pour de nombreuses personnes, cette mission va servir de tremplin pour la suite de leur parcours. Nous leur apportons donc aussi un conseil en gestion de carrière.

Combien de personnes allez-vous recruter pour conduire cette opération de vaccination à son terme?

Jean-Marie Minelli: En tenant uniquement compte des deux sites, nous avons besoin de 200 personnes. Il faut donc maîtriser l’art de la planification. Les contrats doivent être prêts. La plupart des personnes sont engagées à temps partiel. Pour la veille médicale par exemple, ce sont surtout des médecins à la retraite, qui viennent un jour par semaine. Il y a aussi des infirmiers-ères, des agents d’accueil, des agents administratif, des agents de vaccination et des préparateurs (les gardiens de la bonne utilisation des deux vaccins utilisés, Pfizer et Moderna). Nous avons également dû inclure un facteur de risque à cause des quarantaines. Nous avons donc créé un vivier de personnes mobilisables à court terme.

Etes-vous satisfaits des profils recrutés?

JMM: Oui, absolument, et la solidarité est exceptionnelle! Mais ce sont des contrats à l’heure, donc nous partons du principe que ces personnes saisiront peut-être d’autres opportunités si elles se présentent. Nous misons donc sur un turnover élevé de 50%.

Combien de personnes avez-vous déjà engagées à ce jour?

JMM: Nous étions opérationnel dès le 18 janvier 2021. Aujourd’hui (4 février 2021, ndlr), cinq lignes de vaccination sont opérationnelles, soit un rythme de 400 personnes vaccinées par jour. Nous allons monter à 13 lignes à Fribourg et 6 à Espace Gruyère dès le début mai, quand les grandes quantités de vaccins seront livrés. Et nous avons à ce jour 139 personnes interviewées dans le vivier.

Satisfaits de ce résultat?

DB: Oui, je suis très fier de cette équipe RH! Nous avons réalisé un pari fou. De plus, tout le monde a fait preuve d’agilité car il a constamment fallu évoluer dans un environnement où les décisions changent en permanence. Le service que nous livrons est de top niveau. Nous avons rencontré et formé toutes les personnes envoyées sur le terrain.

JMM: La collaboration avec la haute école de santé (heds) et les services du médecin cantonal et de la pharmacienne cantonale a très bien fonctionné. En règle générale, toutes les personnes que nous avons contactées lors de cette campagne de recrutement nous ont beaucoup aidé.

Avec le recul, quelles furent les décisions-clés?

DB: Le choix des personnes de la task force RH a été primordial. La complémentarité nous a permis de naviguer dans un environnement très complexe. Personnellement, je suis quelqu’un d’opérationnel donc j’avais besoin, à mes côtés, d’un profil capable de prendre du recul (Jean-Marie Minelli, ndlr), d’analyser la situation et de planifier. Valérie Pauchard nous a apporté une bonne connaissance de la task force sanitaire et pour le recrutement, nous avions besoin d’une personne qui aime les défis et capable de monter une agence de recrutement en quelques jours (Lidija Milic, ndlr). Et nous avions aussi besoin d’un planificateur, avec une pensée conceptuelle et le goût des chiffres (Vincent Conus, ndlr) et d’une coordinatrice de formation (Mélanie Coutelle du Service du Médecin cantonal). Il fallait réunir ces personnes-là avec un tronc commun d’agilité et de réactivité.

Jean-Marie Minellli, vous venez du secteur privé. Qu’avez-vous appris sur le secteur public?

JMM: Je comprends mieux aujourd’hui la mission publique des RH. Ce sont des enjeux sanitaires publiques qui vont au-delà des enjeux du privé. Nous devons donner des réponses aux parlementaires et à une Conseillère d’Etat.

 

Les intervenants

David Berclaz est responsable RH de la task force sanitaire du canton de Fribourg. Auparavant, il était responsable des opérations RH au CIO (Comité international olympique) et au siège de Swatch Group à Bienne.

Jean-Marie Minelli est le fondateur de Giovica, société active dans le mentoring et le conseil en ressources humaines et gestion d’entreprise. Il est également le co-organisateur des Business Mentoring Days de Fribourg et le partenaire de la société ACTAES pour le canton de Fribourg.

 

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Marc Benninger est le rédacteur en chef de la version française de HR Today depuis 2006.

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