Quelles actions politiques pour renforcer l'emploi des 50+ ?
Trois experts expliquent pourquoi les mesures politiques visant à promouvoir les travailleurs âgés de plus de 50 ans sont jusqu'à présent insuffisantes et quels ajustements sont nécessaires pour relever les défis du changement démographique.

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Anne Jansen est professeure à l'Institut de gestion du personnel et d'organisation de la Haute école spécialisée du nord-ouest de la Suisse (FHNW).
«Aucun groupe d'âge ne devrait être défavorisé sur le marché du travail. Les responsables politiques sont donc confrontés au défi de mettre en place des mesures en faveur des travailleurs âgés sans pour autant désavantager les autres tranches d'âge. Il serait judicieux de se pencher sur la question des cotisations LPP pour les salariés âgés. La loi fédérale sur la prévoyance professionnelle (LPP) prescrit le montant du salaire assuré qui doit être versé chaque année sur l'avoir de vieillesse. Ces cotisations augmentent par paliers avec l'âge et, en règle générale, les employeurs prennent en charge au moins 50% de ces cotisations. Ce principe a pour conséquence que les employés âgés sont «plus chers» pour les employeurs, sans pour autant percevoir des salaires plus élevés. Pour compenser cet inconvénient, les écarts existants pourraient être atténués ou remplacés par des cotisations constantes, c'est-à-dire un taux uniforme pour toutes les tranches d'âge. Une autre solution consisterait pour la Confédération à subventionner en partie les cotisations plus élevées aux caisses de pension afin d'inciter les employeurs à embaucher des travailleurs âgés, par exemple pour les nouvelles recrues âgées de 55 ans et plus.
Outre la réforme de la LPP, il existe déjà d'autres pistes visant à réduire les désavantages structurels et à renforcer durablement les chances des personnes âgées sur le marché du travail. Les services d'orientation professionnelle pour adultes aident les travailleurs à identifier les compétences requises sur le marché du travail et à prendre les mesures de perfectionnement ou de reconversion nécessaires pour rester employables à long terme. Le réseau focus50plus s'engage également à sensibiliser les employeurs, les responsables politiques et la société à la discrimination dont sont victimes les travailleurs âgés.»
Edgar Spieler est directeur Public & Innovation chez von Rundstedt by Alixio et coauteur de l'étude «Les 55+ sur le marché de l'emploi».
«Les responsables politiques devraient communiquer plus activement, en collaboration avec les associations économiques et professionnelles, sur les effets marquants du changement démographique sur le marché du travail. Notre récente étude montre que l'ampleur du vieillissement de la population active et la perte de main-d'œuvre due au départ à la retraite des générations issues du baby-boom est sous-estimée. Une meilleure compréhension de ces changements substantiels contribue à accroître l'intérêt des entreprises pour la tranche d'âge des plus de 50 ans.
La loi sur la formation continue doit être interprétée de manière plus large. Dans leur domaine de responsabilité, la Confédération et les cantons doivent, en collaboration avec le monde économique, promouvoir les compétences en matière d'utilisation des technologies numériques, non seulement de manière générale, mais aussi plus spécifiquement auprès des personnes de plus de 50 ans. En outre, la capacité à gérer sa propre carrière doit être incluse dans le catalogue des compétences de base et faire l'objet d'un soutien spécifique pour ces travailleurs. L'offre Viamia de l'orientation professionnelle doit être complétée par des formats proposés par des acteurs privés afin d'atteindre d'autres groupes professionnels et entreprises.
Les limites d'âge pour l'accès à la retraite et les cotisations salariales liées à l'âge dans le deuxième pilier doivent être supprimées. Dans le cadre de la réforme AVS 21, l'âge ordinaire de la retraite a été remplacé par un âge de référence. Néanmoins, l'âge de 65 ans reste le point de repère central pour les entreprises et les employés. C'est pourquoi la limite d'âge de 70 ans pour le versement des prestations de retraite doit être supprimée. L'échelonnement des cotisations salariales en fonction de l'âge devrait également être supprimé. Il contribue à l'idée répandue selon laquelle les personnes âgées coûtent plus cher.»
Anina Cristina Hille est professeure à l'Institut des services financiers de Zoug (IFZ) et à la Haute école de Lucerne (HSLU), ainsi que membre du groupe de réflexion scientifique focus50plus.
«Des conditions-cadres politiques attractives sont essentielles pour que les plus de 50 ans restent le plus longtemps possible sur le marché du travail. Dans une société vieillissante, des modèles de travail flexibles et adaptés à l'âge ainsi que des systèmes d'incitation à continuer de travailler après l'âge de référence constituent une base importante. Toutefois, il semble pertinent d'ajouter une perspective qui a été peu prise en compte dans les discussions jusqu'à présent: celle de la nouvelle génération des plus de 50 ans et de leur gestion active de carrière.
Cette nouvelle cohorte se distingue nettement des précédentes. Elle dispose de qualifications plus élevées, de parcours professionnels plus complexes et de situations familiales différentes, et évolue dans un monde du travail marqué par des changements technologiques rapides et des incertitudes. Les exigences en matière de compétences augmentent donc, et une vision exclusivement axée sur les conditions-cadres est insuffisante.
Il est essentiel de promouvoir les compétences en matière d'orientation professionnelle qui permettent aux actifs de s'orienter dans cet environnement dynamique, de prendre des décisions réfléchies et de gérer activement les transitions. En fin de carrière, des compétences telles que l'évaluation de sa propre situation professionnelle ou la capacité à trouver un bon équilibre entre vie privée et travail gagnent en importance. Si ces compétences sont largement renforcées et ancrées dans le système éducatif à tous les âges, cela augmente la mobilité professionnelle et ouvre des perspectives pour les plus de 50 ans.
lI faut donc non seulement réformer les conditions-cadres, mais aussi mettre en place une politique qui soutienne systématiquement le développement de ces compétences de gestion, tant au niveau des individus que des employeurs et des conseillers d'orientation professionnelle.»