Made in USA (VI)

Vacances

En cette période de fin d’année, nos amis les Américains vont célébrer Thanksgiving et Christmas. L’occasion pour nous d’aborder ici le thème des vacances (Vacations disent les Américains).

Quant on évoque l’Europe, les salariés américains poussent un énorme soupir en découvrant le nombre de jours de vacances auxquels ont droit leurs collègues d’outre Atlantique. Et si vous évoquez l’exemple français, vous risquez de déclencher des rires moqueurs. 
La question des vacances est ici plus complexe qu’elle en a l’air depuis le vieux Continent. Beaucoup accusent les entreprises américaines de faire travailler leurs salariés sans répit. En clair, de les exploiter en ne leur offrant qu’une poignée d’heures de repos par année. 
La réalité est plus nuancée. Commençons par un constat surprenant. Dans les entreprises qui proposent des congés, il arrive que de nombreux salariés, pourtant autorisés à s’absenter, ne le fassent pas. Deux éléments expliquent cette attitude: la pression managériale et une culture du travail qui considère les vacances comme «socialement» inutiles et économiquement «dangereuses». Faut-il alors penser que salariés américains sont seuls responsables de leur temps de vacances si réduit? La réponse est oui, du moins en partie.
 
Pendant longtemps, la culture américaine a valorisé le «family time» qui encourage les salariés, quelles que soient leurs fonctions, à quitter l’entreprise vers 17h00, pour passer du temps en famille. Les vacances en revanche ne font pas partie de cette culture. Ici, point de mois d’août atone; pas de «ponts» entre les jours fériés et les week-ends, et se prendre trois semaines pour débrancher en été est simplement inimaginable.
 
Les choses sont pourtant en train de changer. Les entreprises américaines sont-elles en train de se rallier à la vision «sociale» de leurs consoeurs européennes? Pas vraiment. L’origine de ce changement est liée à la performance et au pragmatisme. Les sociétés américaines, comme ici, sont contraintes de satisfaire les exigences de la fameuse «génération Y». Les nouveaux arrivants négocient le nombre de jours de vacances auxquels ils ont droit. Remettant ainsi en cause le statu quo dans les entreprises qu’ils rejoignent.
 
Mais d’autres éléments viennent influencer ce changement culturel. Il y a d’abord la politique de santé américaine. Ici, les entreprises sont aussi des assureurs. Les grandes firmes dépensent des millions pour assurer leurs salariés. Afin d’optimiser leurs coûts, elles s’intéressent de plus en plus à la santé au travail. Cette préoccupation les a amené à faire une découverte surprenante: les collaborateurs qui prennent leurs vacances sont moins malades. Donc, économies à la clé!
 
Et puis, nous observons une nouvelle tendance: les entreprises «forcent» leurs salariés à prendre des vacances, au point de leur imposer des pénalités s’ils ne s’absentent pas. Ailleurs, ils augmentent les droits aux congés. Enfin, une troisième tendance fait son apparition. Comme la gestion administrative des vacances coûte cher – cela nécessite des systèmes d’information, du personnel administratif, du temps, de l’énergie, etc. – les patrons d’entreprise se demandent si ce temps et cet argent ne pourraient pas être investis de manière plus intelligente. Pragmatiques, certaines entreprises très innovantes ont décidé de ne plus compter les jours d’absence (lire aussi en page 24). En résumé, vous avez envie de vacances, vous partez. Facile. Il suffit d’avertir votre boss par mail et «bye bye!». Une folie? Il est permis d’en douter. Les chiffres montrent que dans ces entreprises, la moyenne de vacances s’établit autour de quatre semaines, ce qui est bien au-dessus de la moyenne américaine, mais en phase avec pas mal d’autres pays. Et les économies réalisées permettent quasiment de financer ces congés. Bonnes vacances!
commenter 0 commentaires HR Cosmos

Serge Panczuk est Vice President Human Resources International chez Edwars Lifesciences.

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