Berne (ats) Les opposants au revenu de base inconditionnel (RBI) évoquent une "claque". Ses défenseurs ne le voient pas du même oeil: ils estiment avoir remporté une "victoire d'étape" qui a permis de faire connaître le revenu universel.
"On est très contents", a déclaré Ralph Kundig, coordinateur romand des initiants, rappelant que ces derniers sont partis de très loin. Pour Sergio Rossi, professeur d'économie membre du comité de soutien, il faut voir le verre à moitié plein. "Une personne sur cinq a voté pour le RBI, il s'agit déjà d'un succès".
L'initiative "Pour un revenu de base inconditionnel" voulait offrir à l'ensemble de la population la possibilité de mener une existence digne et de participer à la vie publique. La Confédération aurait dû instaurer un revenu de base, versé sans contrepartie à chacun dès la naissance. Les étrangers y auraient aussi eu droit, moyennant un délai de résidence à définir.
Tôt ou tard
L'important, au-delà du vote, est que les citoyens commencent à réfléchir à la proposition, "une idée qu'il faudra tôt ou tard mettre en oeuvre", d'après Sergio Rossi. Il y a d'ailleurs une dynamique favorable, remarque Ralph Kundig: "Nous savons que certains partis ont prévu des séances de travail sur le sujet", se réjouit-il. Membre du comité d'initiative, Daniel Häni se dit aussi "positivement surpris", lui qui tablait sur 15% des voix.
Le montant du revenu de base n'était pas fixé dans le texte. Les initiants, dont l'ancien vice-chancelier de la Confédération Oswald Sigg, proposaient 2500 francs par mois pour adultes et 625 francs pour les moins de 18 ans.
Le projet devait compenser les emplois qui disparaîtront ces 20 prochaines années à cause du développement technologique. Selon l'Office fédéral des assurances sociales, un revenu de base pour tous aurait coûté au total 208 milliards de francs.
Expérimentation dangereuse
Seuls les Verts et quelques socialistes ont soutenu ce texte qui a plutôt embarrassé les syndicats. Le PS craignait que le revenu de base ne se
transforme en dumping salarial généralisé. De l'avis du Conseil fédéral, l'idée était "généreuse mais utopique".
Le comité interpartis opposé au revenu universel a évoqué "une dangereuse expérimentation" qui met en jeu des valeurs suisses comme le travail et la responsabilité individuelle. Des craintes partagées par 1,8 million de Suisses qui ont glissé un "non" dans l'urne, alors que 568'900 citoyens ont dit "oui". Tous les cantons ont largement rejeté le texte.
"C'est une sacrée claque", a estimé Yannick Buttet, membre du comité interpartis. Les problématiques soulevées par l'initiative étaient légitimes, mais la solution n'était pas réaliste. Le revenu de base est maintenant enterré, "une bonne nouvelle" pour le conseiller national (PDC/VS).
Selon Susanne Leutenegger Oberholzer, également membre du comité interpartis, ce rejet clair montre que la population ne veut pas se lancer dans une
expérience avec les assurances sociales. La conseillère nationale (PS/BL) estime que les questions importantes, notamment le mode de financement et le montant du revenu de base, étaient floues.
D'après le conseiller national Marcel Dobler (PLR/SG) "la plupart des citoyens ne sont pas prêts à une expérimentation aussi radicale". Un cinquième des votes représente un très faible soutien, note le membre du comité interpartis, content que l'idée soit enterrée.
Romands moins hostiles au RBI
L'opposition la plus forte est venue du demi-canton d'Appenzell Rhodes- Intérieures, avec 87,4% de "non". Les moins hostiles ont été les Bâlois de la ville (64%), talonnés par les Jurassiens (64,2%). Suivent les cantons de Genève (65,3%), Neuchâtel (68,8%), Vaud (75,3%), Fribourg (75,9%), Berne (77,1%), le Tessin (78,1%) et le Valais (80,8%).