26.06.2017

Sous pression, le patron d'Uber s'en va pour de bon

Fin de course pour Travis Kalanick. L'emblématique et controversé PDG d'Uber a définitivement quitté la tête du groupe américain. Sa position apparaissait intenable dans un contexte de nombreuses polémiques.

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(ats afp reu) Un porte-parole d'Uber a confirmé la démission de M.Kalanick, initialement annoncée par le New York Times, selon lequel le PDG a cédé sous la pression de gros investisseurs.

"J'aime Uber plus que tout au monde et, dans cette période difficile de ma vie personnelle, j'ai accepté la demande des investisseurs de me retirer pour qu'Uber recommence à se développer plutôt que d'être parasité" par les difficultés, a déclaré M. Kalanick dans un communiqué.

Âgé de 40 ans, M. Kalanick avait fondé en 2009 le service de location de voitures avec chauffeur, puis accompagné son succès fulgurant. Il avait déjà annoncé le 13 juin qu'il se retirait de ses fonctions. Ce départ était alors censé n'être que provisoire et lié à des raisons personnelles.

Toujours au conseil d'administration

"Travis a toujours fait passer Uber avant le reste", a réagi le conseil d'administration dans un communiqué séparé. "C'est une décision courageuse, qui témoigne de son dévouement et de son amour pour Uber." Il a précisé que M. Kalanick continuerait à siéger au sein du conseil d'administration d'Uber.

Le groupe fait face à des renvois et démissions en série depuis plusieurs mois, sur fond d'accusations de harcèlement ou de sexisme, ainsi que de soupçons de vols de technologie dans le cadre de poursuites par Waymo, une filiale de Google spécialisée dans les voitures autonomes.

Ses méthodes parfois décriées lui ont aussi valu des ennuis juridiques en matière de respect des réglementations locales et de traitement de ses chauffeurs.

M. Kalanick, comme son bras droit Emil Michael, est accusé d'avoir personnellement encouragé des pratiques déplacées et brutales dans l'entreprise.

Pression de cinq investisseurs

Tandis que M. Michael avait démissionné la semaine dernière, M. Kalanick avait semblé réussir à sauver les meubles, gardant officiellement la tête du groupe même si sa position apparaissait très fragile.

Dans les faits, le PDG avait déjà été mis à l'écart, ce qu'il avait lié à des raisons personnelles, dont le décès accidentel de sa mère. Mais la décision semblait surtout suivre les recommandations d'un cabinet d'avocats chargé par Uber d'enquêter sur sa réputation sulfureuse.

Le cabinet, mandaté à la suite de la démission d'une ingénieure affirmant avoir été victime de harcèlement sexuel, avait incité Uber à "revoir" les responsabilités de son patron.

Les choses en sont restées là pendant une semaine, mais cinq grands investisseurs d'Uber se sont associés pour réclamer la démission définitive de M. Kalanick, selon le New York Times.

D'après le quotidien américain, ces investisseurs auraient réclamé un changement profond de direction dans un courrier intitulé "faire avancer Uber". L'influent fonds spécialisé dans les technologies Benchmark, qui détient un siège au conseil d'administration d'Uber, en fait partie.

Crainte d'une bulle

Elément susceptible d'attiser l'impatience des investisseurs, Uber tarde à devenir rentable. Les comptes du groupe, dont certains éléments ont été communiqués à la presse fin mai, font apparaître une perte de 708 millions de dollars (683,2 millions de francs environ) pour les trois premiers mois de l'année, après un "trou" de 2,8 milliards l'an dernier.

Quand bien même la valorisation du groupe est estimée à plus de 70 milliards de dollars, sur la base de sa capacité de levée de fonds auprès des investisseurs, ces chiffres font craindre qu'Uber se révèle une bulle.

Aux côtés des problèmes de gouvernance, ils ont considérablement refroidi les spéculations autour d'une entrée en Bourse, alors qu'Uber était considéré début 2017 comme l'une des probables introductions majeures de l'année à Wall Street.

Le groupe, qui a incarné pendant des années le bouleversement déclenché par l'arrivée des services de conducteurs face aux taxis, fait aussi maintenant face à une concurrence accrue. Le groupe Lyft ne manque notamment pas de profiter des déboires d'Uber pour développer une image d'entreprise-modèle.