Salaires

La rémunération des grands patrons suscite l'émoi en France

Primes de performance, retraites chapeau, parachute doré, "golden hello" ou simple bonus: peu importe leur nom, les rémunérations des grands patrons suscitent la grogne des actionnaires, ainsi que des syndicats en période de modération salariale.

Paris (ats/afp) "Je ne me fais pas de souci pour votre retraite, mais pour la mienne", s'est indigné un petit porteur pendant la récente assemblée générale de Nexans, lors
d'une discussion sur la retraite chapeau de Frédéric Vincent, le président du fabricant de câbles, dont le cours boursier a chuté ces dernières années et dont les actionnaires ont été privés de dividende.

Si l'assemblée générale de Nexans a finalement approuvé sans problème la rémunération de Frédéric Vincent, qui avait certes fait un geste l'an dernier en renonçant à son bonus en raison des difficultés du groupe, d'autres ont transmis un message très clair à leurs dirigeants, pour la deuxième année de l'application du "say on pay", mesure qui contraint les dirigeants à soumettre leurs rémunérations à un vote consultatif.

Ces résolutions constituent l'une des rares occasions pour les actionnaires de manifester leur mauvaise humeur sur les salaires des grands patrons, même quand ils ne parviennent pas à obtenir le soutien de la majorité.

Or selon une enquête publiée fin avril par Facta pour "La Tribune", les rémunérations des patrons du CAC 40 ont progressé de 10% l'an passé, grâce à l'octroi d'actions et d'options.

Faible approbation chez Renault

Cette année, lors de l'assemblée générale de Renault, la rémunération du directeur général Carlos Ghosn n'a été approuvée que par 58,33% des voix et celle de Franck Riboud, le patron de Danone, n'a reçu le soutien que de 53% des actionnaires, des résultats particulièrement significatifs et serrés, alors que la plupart des résolutions obtiennent des scores supérieurs à 90%.

"Il faut veiller à ce que les règles évoluent afin d'éviter les abus. Dans 90% des sociétés, ça se passe relativement bien, mais il y toujours un certain nombre d'entre elles qui essaient franchir la ligne jaune et c'est là que se produisent les remous et les scandales", explique Colette Neuville, présidente de l'Association de défense des actionnaires minoritaires (ADAM).

Elle souligne notamment "l'inadaptation des critères de rémunération" aux performances de l'entreprise.

L'Etat s'efforce d'encadrer les revenus des grands patrons. Dans la Loi Macron, approuvée mardi par le Sénat, un article conditionne l'octroi de retraites chapeau aux performances de l'entreprise et en limite le rythme d'accumulation à 3% du salaire de référence par année d'ancienneté.

L'Etat a également plafonné depuis 2012 à 450'000 euros (près de 470'000 francs) le salaire annuel des patrons de groupes où il est majoritaire, comme EDF ou Areva.

Les syndicats, pour leur part, s'indignent régulièrement des primes accordées aux patrons en période de disette pour les salariés.

Chez PSA Peugeot Citroën, la CGT a ainsi dénoncé que le directeur général Carlos Tavares ait perçu en 2014 un salaire supérieur à 2,7 millions d'euros, grâce au versement d'une part variable de 1,6 million jugée "scandaleuse".

"Alors que le seul directeur général a eu une augmentation de rémunération de 211% en un an (+86% en moyenne pour les quatre membres du directoire), pour les salariés la dernière augmentation de salaire (43 euros bruts par mois) remonte à mars 2012!", s'insurge le syndicat.

Retrait chapeau de Varin

Toujours chez PSA, la révélation que l'ex-patron Philippe Varin allait toucher une retraite chapeau de près de 300'000 euros alors qu'il avait promis d'y renoncer a récemment suscité une polémique.

Chez Sanofi, syndicats et petits actionnaires se sont élevés contre la prime de bienvenue, ou "golden hello", reçue par le nouveau directeur général, Olivier Brandicourt, en compensation des avantages auxquels il a dû renoncer en quittant son précédent employeur, Bayer, s'est justifié le groupe pharmaceutique.

Une somme à laquelle se sont ajoutés près de trois millions d'euros versés à son prédécesseur Chris Viehbacher comme indemnité après son éviction à l'automne. Le porte-parole du gouvernement Stéphane Le Foll avait alors jugé ces pratiques "incompréhensibles" tandis que la ministre Ségolène Royal appelait à la "décence des comportements".

Début mai, la résolution portant sur les conditions de rémunération de M. Brandicourt a été approuvée à 64,8% par les actionnaires et la résolution 11 sur les conditions de départ de M. Viehbacher à 61,6%.

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