Droit et travail

Les contrats freelance: la flexibilité à bon prix

Le «freelance» est une forme de travail flexible qui permet de résoudre rapidement et à moindre coût les situations de surcharge de travail dans l’entreprise. Engager du personnel hors de l’entreprise exige la création de rapports contractuels adaptés à la situation, notamment pour les cas de litige.

La flexibilité et l’indépendance du «freelance» sont intéressants pour les entrepreneurs et pour les prestateurs du travail. De tels accords permettent de surmonter des surcharges de travail occasionnelles. Ces situations peuvent être surmontées à meilleur coût et plus rapidement que par le personnel ordinaire de l’entreprise. Pour le «freelancer», cette activité permet un changement de rôle dans sa famille, un meilleur aménagement de ses activités personnelles et un meilleur développement professionnel. L’abandon des rapports de travail survient en pratique surtout lorsque les parties veulent renoncer aux garanties et contraintes du contrat de travail. Le retour à la sécurité de ce contrat est surtout motivé par des considérations fiscales ou de protection sociale. C’est ce qui arrive quand l’accès au «freelanceer» à une situation indépendante a échoué. La tendance de confier à des prestateurs de services externes ce qui était antérieurement accompli par les employés de l’entreprise a pour effet de créer de nombreuses relations contractuelles nouvelles. Selon les cas concrets, il y a lieu de rechercher les types de contrats qui s’appliquent à l’activité du «freelance» en cas de litige.

L’activité typique de «freelancer» est réglée par les dispositions du contrat d’entreprise (art. 363 ss CO). Le travailleur indépendant promet alors à l’entrepreneur un certain résultat («l’ou-vrage»). En revanche, si le contenu du contrat s’accomplit par une gestion, on appliquera les règles du mandat (art. 394 ss CO).

En pratique, consciemment ou non, les parties s’abstiennent de se référer aux règles du contrat de travail (art. 319 ss CO). Un tel contrat n’est alors pas conclu. L’employeur ne définit pas – comme en matière de contrat de travail classique – le contenu du travail exigé ni ne donne des indications. Le «freelancer» n’est pas intégré dans l’organisation du travail de l’entreprise. Le critère de la subordination n’est pas donné. Bien plutôt, le travail doit être accompli de la manière la plus indépendante possible.

Il est surtout accompli en fonction du but recherché. L’apparition de formes d’emploi flexibles a créé une «zone grise» où la distinction entre l’activité dépendante et indépendante devient impossible. On tente de rendre acceptable la règle du «Hire and fire» en admettant que des activités typiques au contrat de travail deviennent des prestations de contrat d’entreprise ou de mandat. Ce faisant, l’entreprise se met au bénéfice des dispositions des art. 377 resp. 404 CO qui donnent la possibilité de mettre fin à l’engagement en tout temps et sans délai. Dans ce cas, le «freelancer» ne peut réclamer que le paiement du travail déjà effectué ainsi que des dommages et intérêts. Il ne peut pas exiger la reprise de son activité, il est donc à la merci de l’entreprise.

Le contrat de prestations entre le «freelancer» et l’entrepreneur se conclut par oral. Le contenu du contrat devrait au moins régler les points suivants:

  • La désignation de l’accord comme contrat de «freelancing»;
  • La désignation des parties concernées;
  • La définition détaillée de la prestation à fournir;
  • La durée de la relation contractuelle;
  • L’indication des dispositions légales applicables au contrat; soit normalement le contrat d’entreprise (art. 363 ss CO) ou le mandat (art. 394 ss CO);
  • L’indication du droit applicable et du tribunal compétent

L’indépendance apparente du «freelancer» pose problème. Il arrive qu’un rapport de travail semble être une activité indépendante alors qu’en réalité les conditions d’un contrat individuel de travail sont requises (art. 319 ss CO). Ainsi, il existe parfois un rapport de subordination quant à la personne et aussi dans le cadre de l’entreprise, situation qui parle pour un statut de travailleur. Les dispositions du contrat de travail comprennent un certain nombre de règles contraignantes, destinées à garantir la juste protection des parties au contrat.

Dans les cas d’indépendance apparente, ces dispositions devraient être appliquées. Ne l’étant pas, il résulte, surtout pour l’employeur, des risques financiers importants qui sont difficiles à chiffrer. En effet, l’entrepreneur n’est alors plus considéré comme un mandant, mais comme un employeur. En conséquence, il doit assurer des contributions d’assurances sociales pour le «freelancer». Bien plus, il devra se soumettre à l’obligation d’assurer le «freelancer» contre les risques d’accident et de maladie, sans compter les charges qui lui incombent au titre de la prévoyance professionnelle. Cela signifie que l’entrepreneur qui recourt aux prestations «freelance» doit, en plus de ce qui a été dit plus haut quant au contenu de leur contrat, ajouter une clause obligeant le «freelancer» à s’assurer seul contre les risques de maladie et d’accident et à se charger de ses cotisations d’assurances sociales. En outre, le «freelancer» devrait remettre à l’entrepreneur une attestation de la caisse de compensation compétente établissant sa situation de travailleur indépendant. 

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José Sanchez, licencié en droit, dispose d'une longue expérience de conseiller en droit du travail et des assurances sociales. Il dirige le département de conseils juridiques de la société Sgier et partenaires, S.à.r.l. Il est en outre chargé de cours de droit privé à la haute école professionnelle du droit d'Argovie.

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Marc Benninger est le rédacteur en chef de la version française de HR Today depuis 2006.

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