Les DRH au Comex: une évidence toujours débattue
Il semble évident que les DRH devraient siéger au sein des comités exécutifs (Comex). Après tout, de multiples études ont prouvé que les entreprises affichant la présence de leur direction des ressources humaines à ce niveau sont généralement plus performantes. Pourtant, en 2025, cette évidence continue de provoquer des débats animés.

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Pourquoi une telle résistance? Pourquoi les CEO, souvent épuisés par la complexité croissante des environnements organisationnels, hésitent-ils encore à inclure leur DRH dans ce cercle stratégique? Ce paradoxe invite à réfléchir à la nature profonde des entreprises et à la place que les DRH devraient y occuper.
Une réalité économique sans concession
Les discours managériaux affichent avec complaisance que le bien-être de leurs collaborateurs est leur priorité. «People first!» entend-on dans les présentations stratégiques. Mais soyons honnêtes: au sein des Comex et des conseils d’administration, les décisions sont dictées par les chiffres, la rentabilité et la compétition.
Les entreprises sont des machines économiques et c’est heureux. Mais c’est aussi dans ce cadre que les DRH doivent opérer. La responsabilité sociale, la diversité ou l’inclusion sont souvent perçues comme des thématiques annexes, loin des priorités dictées par les impératifs de croissance et de profitabilité. Cette tension place les DRH dans une posture fragile. Lorsqu’ils se contentent de «faire tourner la machine RH», leur impact stratégique est limité, renforçant ainsi leur absence au Comex.
Alliés stratégiques pour des CEO isolés
Deux rôles émergent pour les DRH dans ce contexte et ils doivent choisir: administrer tactiquement ou influencer stratégiquement. Ce choix conditionne leur place au Comex. Optant pour l’influence stratégique, ils s’engagent dans un chemin exigeant qui mène à une influence durable, une maîtrise des dynamiques de pouvoir et les transforme en alliés précieux des CEO.
Justement, ce qu'il faut bien prendre en compte, c'est que la survie des CEO repose sur une équation complexe. Dans des Comex où les ambitions individuelles et les luttes de pouvoir dominent, les CEO ont besoin d’interlocuteurs de confiance. Les DRH peuvent être ces interlocuteurs précieux lorsqu’ils démontrent une compréhension subtile des enjeux stratégiques et organisationnels.
Leur rôle ne se limite alors plus uniquement à des questions de conformité ou de bienveillance. Ils deviennent des architectes de la gouvernance et des facilitateurs des systèmes de management. Dans ce rôle, le DRH navigue avec habileté entre les intérêts divergents pour créer de la valeur.
Un tel positionnement exige du courage, de la confiance en soi et une capacité à prendre position. Tenter de conserver une posture neutre à ce niveau conduit inévitablement à l’échec, voire au burn-out.
Agir pour devenir indispensable
Pour être considéré comme stratégiquement indispensable, le DRH doit:
- Comprendre les enjeux économiques et stratégiques: maîtriser les dynamiques de marché, les tendances sectorielles et les facteurs politiques qui influencent l’entreprise.
- Construire son influence: investir dans un réseau interne et externe solide y compris et surtout les milieux économiques. Ces connexions deviendront des atouts lorsqu’il s’agira d’être entendu et écouté.
- Travailler sa communication: affirmer ses points de vue avec clarté, sans crainte d’affronter les enjeux.
- Accompagner dans l’ombre: rattraper les erreurs de communication, expliquer les incompréhensions... Cela fait partie du rôle du DRH lorsqu’il est au Comex.
- Ne pas assommer les dirigeants avec les sujets RH: le directeur des finances est au Comex car il fait de la donnée financière une clé de voûte de la stratégie d’entreprise. De même, le DRH doit transformer ses données humaines en leviers stratégiques pour s'inscrire au cœur des décisions de l'entreprise.
Acteurs de leur propre destin
Les DRH sont les architectes de leur propre nomination. L’exécution tactique est confortable, mais seule l’influence stratégique ouvre la voie au Comex. Arrêtons de blâmer les CEO pour l’absence des DRH à ce niveau. C’est aux DRH de s’approprier leur place de manière stratégique. Ce choix, exigeant et jalonné de sacrifices, demande résilience et engagement. Mais il mène à une position d’influence durable et à une maîtrise des dynamiques de pouvoir qui transforme leur rôle en levier clé de la stratégie.