Débat

Pourquoi les employeurs ne recrutent-ils pas plus de réfugiés?

La barrière de la langue et certains préjugés négatifs peuvent décourager des employeurs de recruter des personnes issues de l’immigration hors Schengen. Dans le canton de Fribourg, le projet pilote «Façonne ton avenir» facilite leur intégration. 

Catia Simao, Spécialiste RH, Responsable Formation & Développement au sein du Groupe JPF 

«Le recrutement de réfugiés représente une opportunité pour de nombreuses entreprises, mais il demeure un défi pour les employeurs. Plusieurs freins expliquent cette situation: la barrière de la langue, l’intégration dans les équipes et les motivations réelles. La communication est essentielle au sein d’une entreprise, et la maîtrise insuffisante du français peut compliquer les échanges et ralentir l’efficacité du travail. De plus, l’intégration culturelle et professionnelle nécessite un accompagnement et des ressources que toutes les entreprises ne peuvent mobiliser. Il manque une étape intermédiaire pour faciliter cette transition. Un intermédiaire dédié, capable d’informer les candidats sur les métiers, de sélectionner les profils adaptés et de les accompagner avant leur arrivée en entreprise, serait une solution pertinente. C’est précisément l’objectif du projet pilote Façonne ton avenir, mené par la Fédération Fribourgeoise des Entrepreneurs et l’OSEO Fribourg. Ce programme a permis d’expérimenter une approche structurée d’accueil et d’intégration des travailleurs issus de l’immigration hors espace Schengen. Ayant participé à la première édition test, nous sommes convaincus qu’une telle initiative est pertinente et nécessaire. Elle permet d’intégrer les réfugiés dans les meilleures conditions possibles, tout en répondant aux besoins des entreprises. Les réfugiés représentent une main- d’œuvre précieuse, encore faut-il leur donner les moyens de s’adapter et de réussir.» 

David Valtério, directeur de la Fédération fribourgeoise des entrepreneurs (FFE) 

«Nous sommes actuellement en pénurie de main-d’œuvre dans de nombreux secteurs de notre économie et le secteur de la construction n’y déroge malheureusement pas. Nous devons trouver des solutions pour y remédier et la piste du recrutement de réfugiés en est une. Du point de vue de la Fédération Fribourgeoise des entrepreneurs (FFE), nous constatons que les employeurs ne recrutent pas ou plus de réfugiés pour plusieurs raisons: des a priori négatifs, un manque de connaissance de la législation cantonale et fédérale, de mauvaises expériences passées, et surtout l’absence d’un facilitateur préparant leur intégration dans le monde du travail. Pour remédier à cette problématique et prendre ce rôle de facilitateur pour les entreprises et les candidats potentiels, la FFE a mis en place plusieurs mesures: des cours de langues spécifiques au domaine de la construction destiné pour les travailleurs étrangers ou le projet pilote «Façonne ton Avenir» développé en partenariat avec le canton et l’OSEO, et certainement rejoint pour cette 2ème édition par les syndicats. Enfin, ce qu’il y a d’intéressant avec ce projet pilote destiné initialement aux migrants, c'est qu’il peut aussi s’adresser à d’autres publics potentiels en réinsertion ou en reconversion professionnelle. Donc, ce projet initialement prévu pour des réfugiés va permettre peut-être à d’autres publics potentiels de rejoindre le monde de la construction.» 

Julien Morandi, membre de la direction de WirBauen (construction et génie civil) 

«En tant qu’employeurs, nous ne cherchons pas un type de population spécifique mais des personnes motivées, prêtes à s’intégrer dans un monde professionnel dynamique. Grâce à notre collaboration avec la FFE (Fédération Fribourgeoise des entrepreneurs) et l’OSEO, nous avons pu accueillir des réfugiés en stage et avons constaté qu’ils correspondaient parfaitement aux attentes des employeurs. Leur engagement et leur volonté d’apprendre leur ont donné l’opportunité de s’intégrer à nos équipes. C’est pourquoi il est difficile de répondre à la question: pourquoi les employeurs ne recrutent-ils pas de réfugiés? Dans le secteur de la construction, toute personne motivée à travailler trouve sa place. Peut-être que certains peuvent avoir des préjugés négatifs ou craignent la barrière de la langue! Cependant, chez Wirbauen, ce programme, nous a permis d’accueillir deux nouveaux collègues, dont l’un a débuté un apprentissage de maçon. Nous sommes fiers d’avoir participé à cette initiative et serions encore plus heureux de renouveler l’expérience.» 

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Texte: Catia Simao

Catia Simao est spécialiste RH, responsable Formation & Développement au sein du Groupe JPF. 

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David Valtério est le directeur de la Fédération fribourgeoise des entrepreneurs (FFE).

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Julien Morandi est membre de la direction de WirBauen (construction et génie civile).

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